PDCI : Quand le tribalisme prend le pas sur la démocratie interne

Le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) a perdu le nord. C'est le moins qu’on puisse dire devant les évènements qui se succèdent au sommet du vieux parti. Son président élu dans des conditions illégales, Tidjane Thiam, a rendu sa démission le vendredi dernier et s’apprête à reprendre son fauteuil aujourd'hui 14 mai au terme d’un congrès extraordinaire convoqué par le président intérimaire Ernest N'koumo Mobio. 48 heures pour organiser un congrès dans les règles de l’art? Ce délai est intenable pour nombre de militants. Qui s’insurgent contre la tenue d’un congrès dans la précipitation. « Je suis contre les orientations du parti. Nous venons de sortir d’un bureau politique. Et on nous dit que nous devons faire un congrès ce mercredi. Je suis contre la tenue d’un congrès après-demain. Le temps imparti pour l’organisation de cette rencontre capitale est court. Moi, j’ai un candidat. Pour moi, il doit être candidat à ce congrès. Je pense qu’il faut arrêter ce désordre. Mon candidat, c’est Maurice Kakou Guikahué. Il faut mettre en place un comité électoral dans les règles de l’art pour qu’ensemble nous puissions trouver un président digne du parti. Je propose que le congrès s’organise en juin pour que les éventuels candidats se préparent. On ne peut organiser un congrès en 2 jours. Je suis sorti de la salle parce que je ne suis pas d’accord », a confié à la presse Sanogo Lacina, membre du bureau politique, à l’issue de la dernière réunion du bureau politique organisé le lundi dernier. Il a ajouté avoir été pris à partie par des militants. Son militantisme a été mis en doute. « J’ai été traité d’infiltré, de militant du RHDP. C’est une insulte à mon militantisme », a-t-il dénoncé.
Avant lui, un autre militant, lors d’une réunion au siège du vieux parti, avait souhaité la mise en place d’un plan B. « Même si on dit qu’il n’y a pas un plan B, C ou Z, je souhaite que la sagesse vous habite pour qu’on ait un plan B au cas où » avait-il proposé. Des militants furieux lui ont arraché le micro. Avant de scander : « Titi président, Titi président ». Le malheureux candidat a été contraint de quitter la salle manu-militari. Avant, Maurice Kakou Guikahué avait été empêché de candidater en 2023 contre Tidjane Thiam. Jean-Louis Billon, qui a levé la voix pour dénoncer la gestion du PDCI, a été ostracisé.
Comme on peut le constater, aujourd'hui, la démocratie interne au sein du parti démocratique a foutu le camp. Le dialogue est rompu entre les différents camps qui se disputent la présidence du parti. Dans la bataille fratricide, les textes régissant le parti septuagénaire sont foulés aux pieds par le camp tribaliste qui accorde la prédominance au matriarcat au détriment des adversaires qui estiment qu’il faut faire triompher la démocratie interne par l’application des textes.
Dans cette logique, il n'est pas bon pour les militants d’avoir une idée contraire à celle du clan. Auquel cas, on est violemment combattu. Ils sont nombreux les militants qui payent les frais de cette prise en otage du parti de Félix Houphouët-Boigny par les faucons et les ivoiritaires. Qui ont décidé de dépoussiérer le fameux concept de l’ivoirité pour atteindre leurs objectifs obscurs.
C'est évident, le PDCI gagnerait à mettre de l’ordre en son sein avant de venir sur la scène nationale pour donner des leçons de démocratie. Quand on est incapable de respecter ses propres textes, il est évident que les textes de lois ne vont pas échapper aux violations. Et, après, on évoquera un harcèlement judiciaire. Là où la justice demande simplement le respect des textes et de lois. Sinon comment comprendre que les directions intérimaires mettent tout en œuvre pour imposer quelqu’un qui ne respecte pas les conditions d’éligibilité à la tête du PDCI et à magistrature suprême ?
Pour rappel, Tidjane Thiam pour qui le PDCI se bat a été radié de la liste électorale. Il est désormais inéligible comme l’ex-président Laurent Gbagbo, l’ancien président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro et Charles Blé Goudé tous frappés par des décisions judiciaires.
Lacina Ouattara