Interview-Me Georges N’Goan (Président du CNO-CIV) : « Certains parlent d'éthique sans respecter les lois dans leur propre fédération »
Au lendemain d’une Assemblée Générale marquée par un budget record et quelques contestations, le président du Comité National Olympique de Côte d’Ivoire, Me Georges N’Goan, revient sur les enjeux, les critiques et les perspectives. Il défend la transparence de son institution, dénonce certaines dérives et réaffirme son engagement pour les valeurs de l’olympisme.
Le Patriote : Que doit-on retenir de cette Assemblée Générale tenue samedi dernier ?
Me Georges N’Goan : Elle s’est déroulée dans d’excellentes conditions. Les présidents et présidentes de fédérations ont partagé énormément d’informations, que nous avons pu analyser sereinement. L’ambiance était cordiale, fraternelle, fidèle aux valeurs de l’olympisme. C’était véritablement une Assemblée Générale d’amitié.
LP : Le budget validé dépasse les 2 milliards de francs CFA. Comment l’expliquez-vous ?
Me GN : Ce budget exceptionnel s’explique par la préparation des Jeux Olympiques de la Jeunesse Dakar 2026. Former les jeunes athlètes nécessite des investissements lourds : équipements, stages, compétitions, logistique. C’est cette préparation qui porte le budget à un peu plus de 2 milliards. En temps normal, notre budget annuel se situe entre 800 millions et 1 milliard.
LP : Environ dix présidents de fédérations étaient absents. Cette désaffection ne vous interpelle-t-elle pas ?
Me GN : Je ne peux pas expliquer leur absence. Moi, j’étais présent. Il faut poser la question aux absents.
LP : Justement, certains d'entre eux ont déposé une motion de protestation contre votre gestion. Comment réagissez-vous face à ces accusations ?
Me GN : Parmi les dix signataires, seuls cinq sont réellement présidents de fédérations. Ce sont les mêmes qui nous contestent depuis notre élection. Dès 2023, ils ont saisi le CIO, mais leurs arguments ont été jugés faibles et rejetés. Depuis, ils multiplient les attaques. Pour la première fois, ils ont exposé publiquement des affaires internes au CIO, ce qui n’est pas conforme à l’esprit de l’olympisme. Nous avons toujours gardé ces questions en interne par respect pour les institutions. Puisqu’ils ont choisi la médiatisation, nous sommes obligés de répondre.
LP : Leurs revendications ne sont-elles pas légitimes ?
Me GN : Certains parlent d’éthique, alors qu’ils ne respectent même pas les lois dans leur propre fédération. Prenons l’exemple d’Honoré Zolobé, président de la Fédération de badminton. Sa fédération ne compte légalement que deux personnes, en réalité une seule : son épouse. Nous avons alerté le ministère pour clarifier cette situation. Comment parler d’éthique quand 5000 athlètes ne disposent que de cinq voix, tandis que des personnes nommées contrôlent toutes les décisions ? C’est contraire aux principes démocratiques.
LP : Honoré Zolobé a pourtant été secrétaire général du CNO-CIV. Qu'est-ce qui a provoqué la rupture ?
Me GN : Nous l’avions nommé à l’époque, mais nous avons constaté qu’il n’était pas compétent pour ce poste. Dans la vie, il faut être loyal. On ne peut pas travailler au sein du CNO et rapporter à l’extérieur des informations internes. La confidentialité est un principe fondamental du mouvement olympique. Je n’ai jamais parlé publiquement d’une fédération, sauf aujourd’hui, parce qu’ils ont porté nos affaires sur la place publique.
LP : Vous accusez un président de fédération d’avoir détourné des bourses d’athlètes mineurs…
Me GN : Oui. Il s’agit du président de la Fédération ivoirienne de lutte. Nous avons saisi la fédération internationale et le ministère des Sports. Ce président a prélevé à plusieurs reprises de l’argent sur les bourses des jeunes athlètes, pour un montant total avoisinant 7 millions de francs CFA. Ces bourses sont destinées à aider les enfants et leurs familles. Et aujourd’hui, ces mêmes personnes se permettent de donner des leçons de morale. C’est un comble.
LP : Le CNO est également accusé d'ingérence dans certaines fédérations, notamment à la boxe. Que répondez-vous ?
Me GN : Il n’y a eu aucune ingérence. Concernant la boxe, c’est le ministère des Sports qui nous a saisi, car la fédération n’avait plus d’agrément, ne bénéficiait plus de la parafiscalité et était en situation de bicéphalisme. Nous avons travaillé trois mois à rétablir la situation. Puis le ministère nous a demandé de suspendre le processus à cause des élections présidentielles. Nous avons simplement exécuté la demande.
LP : Et concernant le judo, où votre intervention a suscité la polémique ?
Me GN : Le CNO n’est pas intervenu dans le conflit initial. Le président du judo avait convoqué une Assemblée générale ordinaire, devenue extraordinaire pour modifier les statuts. Certaines personnes se sont senties lésées et ont saisi l’instance arbitrale du CNO, qui a annulé toutes les décisions. Nous sommes intervenus ensuite, lorsque nous avons vu que l’Assemblée élective prévue le 6 décembre allait se dérouler dans des conditions irrégulières. Nous avons informé le ministère, l’Union Africaine et la Fédération internationale. Les faits nous ont donné raison.
LP : Avec quel résultat ?
Me GN : Le ministère a suspendu l’Assemblée générale. Son communiqué précise que cette décision suit les réserves et recommandations du CNO, ce qui prouve que nous avons bien travaillé. Nous défendons uniquement les règles, la transparence et les valeurs olympiques. Nous ne répondrons pas aux polémiques, mais nous ne laisserons pas dire n’importe quoi.
OUATTARA Gaoussou
