Hamed Bakayoko : Quatre ans après, l’éternel chouchou des Ivoiriens !

C’est le poète irlandais et prix Nobel de littérature – décédé en 2013 – Seamus Heaney, qui posait cette question pour le moins inattendue : « Y a-t-il une vie avant la mort ? ». La réponse la plus banale qui viendrait spontanément à l’esprit de tout le monde est un évident « bien sûr que si ! ». Pour mourir, il faut bien vivre ou avoir vécu, serait-on tenté de lui rétorquer. Mais c’est le philosophe et écrivain français de la Renaissance, Michel Montaigne, qui disait aussi : « Ce n'est pas la mort que je crains, c'est de mourir (que je crains) ». Tout est dit là ! Car la mort est une chose, c’est une finalité – autant dire une fatalité – de la condition humaine. Mais comment par-delà cette mort, ne meurt-on pas – une seconde fois – dans la mémoire des vivants ? Autrement dit, que laisse notre mort à la postérité ? Comment survit-on à la mémoire collective après notre mort ?
Ce faisceau de grandes questions reviennent à nouveau au galop quatre ans, jour pour jour aujourd’hui, après la disparition brusque et tragique d’Hamed Bakayoko. L’ancien Premier ministre ivoirien, c’est un constat clair et net, reste bel et bien le chouchou des Ivoiriens. Le temps, du reste encore très court, qui les sépare de ce terrible rappel à Dieu, le 10 mars 2021, n’aura guère altéré le grand amour que ses compatriotes avaient pour le Golden Boy. Tant, autant la disparition du « fils » du Président Alassane Ouattara aura marqué au fer rouge les consciences des habitants de ce pays et bouleversé bien des vies en Côte d’Ivoire, autant l’œuvre de l’homme, sa trace en tant que serviteur de ce peuple lui aura apporté – à ce peuple – bonheur et espoir de lendemains meilleurs.
C’est que, comme très peu de personnes ont pu l’incarner de leur vivant, ce self-made-man, qui parvint à force de travail et d’audace à se hisser au zénith de l’échelle sociale, était un mélange de « rêve, d’inspiration et de passion » pour bon nombre de ses compatriotes, notamment les jeunes qui voyaient en lui l’exemple achevé de l’accomplissement humain. Ils n’avaient pas tort parce qu’Hamed Bakayoko a donné la preuve toute sa vie qu’il était une conjonction de valeurs éthiques et humaines dont les plus connues sont la loyauté, le courage, la responsabilité, la solidarité, l’écoute, la bienveillance et bien sûr cette générosité légendaire qui en a fait un homme providentiel, qui ne savait pas tourner le dos aux plus faibles, aux plus nécessiteux, mais aussi aux plus ambitieux, qui avaient besoin d’un coup de pouce pour se réaliser.
D’Abobo à Séguéla, sa ville natale, mais bien au-delà dans toutes la Côte d’Ivoire, ses actions sociales parlaient pour lui. Homme de contact et d’ouverture, il n’était l’ennemi de personne : acteurs politiques, artistes, citoyens ordinaires.
Mais Hambak, c’était avant tout ce passionné de travail, puis ce serviteur dévoué de l’Etat qui donnait toujours le meilleur de lui-même pour transformer en succès tout ce qu’il entreprenait. Son parcours depuis ses années étudiant, au début de la décennie 80, en passant par son militantisme actif au MEECI, à la Jeunesse estudiantine et scolaire du PDCI (JESPDCI) puis finalement, à la faveur du printemps de la presse, la création par ses soins du journal Le Patriote ainsi que sa prise en main en 1993 de la présidence de la radio Nostalgie, montre son engagement à se surpasser pour les causes qu’il endosse.
De même, son entrée en politique aux côtés d’Alassane Ouattara, dont il a été de tous les combats pour la conquête du pouvoir et aux postes-clé de tous les gouvernements avant de finir par en prendre lui-même la tête, confirmera une chose essentielle que nul ne peut lui dénier aujourd’hui : sa fidélité et sa loyauté sans faille au grand homme d’Etat et bâtisseur connu et reconnu par les Ivoiriens et le monde entier. Ce deuxième anniversaire de la disparition Hamed Bakayoko, l’ancien DGA du FMI ne pourra, de ce point de vue, que le ressentir que comme un vide.
Ce même de bonheur perdu, les militants du RHDP ne le déploreront que trop en se souvenant d’un homme qui aura été un soutien rassurant et apaisant pour eux ; un homme qui leur aura donné tant d’espoir et de foi en un avenir meilleur et gagnant, dans la trajectoire de la sienne propre. Même au plan politique, au sein d’une opposition parfois farouche au pouvoir, il s’en trouvera, pour sûr, un bon nombre de partisans et de dirigeants pour regretter un homme d’exception et de dialogue. Un homme dont l’entregent hors-du-commun en faisait le bienvenu dans toutes les chapelles politiques. Un homme dont l’approche pondérée et pour le moins conciliant des questions d’intérêt national séduisaient les uns et les autres.
Quatre ans donc déjà ! Hamed Bakayoko, l’enfant du peuple, celui qu’on surnommait également l’« Etoile d’Etat » reste dans la mémoire des Ivoiriens de tous âges, de toutes conditions sociales, de toutes régions et croyances religieuses, un homme vrai et authentique, un homme de paix et d’amour, un homme parti trop tôt et qui laisse ce grand vide dans un pays qu’il a tant aimé et servi.
Puisse Dieu, le Miséricordieux, continuer à veiller sur son âme.
KORE EMMANUEL