Interview-Salif Koné alias Salyffou (réalisateur, scénariste, acteur et producteur ivoirien) : « Le film sortira au cinéma le 6 juin »

Salif Koné, alias Salyffou, est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur ivoirien. Il est considéré comme l'une des voix les plus prometteuses du cinéma africain contemporain. Passionné par le septième art depuis son plus jeune âge, il se distingue par une créativité audacieuse et une narration visuelle empreinte d'émotion. Récemment lauréat du prix de l'Union européenne au FESPACO pour son premier long métrage « Au-delà des illusions », et invité spécial au pavillon africain du Festival de Cannes, il nous raconte les défis qu'il a rencontrés pour promouvoir son film, pourtant très apprécié dans les festivals.

Interview-Salif Koné alias Salyffou (réalisateur, scénariste, acteur et producteur ivoirien) : « Le film sortira au cinéma le 6 juin »
Koné :

Le Patriote : On vous connaît en tant que vidéaste sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, vous vous lancez dans un projet de long métrage. N'a-t-il pas été trop difficile de basculer dans le monde du cinéma ?

 

Salif Koné : Bien sûr, car nous avons rencontré de nombreuses difficultés. La première était d'ordre financier, étant donné que le film a été entièrement réalisé sur fonds propres, pour un coût de 60 millions. En tant que seul producteur, cela n'a vraiment pas été facile. C'est pourquoi le tournage nous a pris un an. Ma maison de production réalise également des spots publicitaires, du contenu audiovisuel et propose de la location de matériel, c'est de là que je tirais les fonds. Cependant, pour mener à bien ce projet, nous avons même dû produire des clips. J'ai dû réaliser des clips, ce qui n'était pas du tout mon domaine et quelque chose que je n'apprécie pas. Mais j'ai dû le faire pour générer des revenus et achever le tournage. Il y a eu des périodes où nous n'avons pas tourné pendant trois ou quatre mois, faute de moyens. Il fallait alors trouver de nouvelles sources de financement. La première difficulté a donc été financière. Quant aux autres obstacles que nous avons rencontrés par la suite, je ne les perçois pas comme des difficultés, mais plutôt comme des défis. Il y a eu plusieurs défis à relever, notamment la gestion des équipes et des acteurs, ainsi que la recherche des bons interprètes. Cela n'a pas été simple. La principale difficulté est restée, en effet, d'ordre financier.

 

 

LP : Qu'est-ce qui est le plus difficile quand on est producteur indépendant ?

SK : Je dirais que le plus difficile est de réunir les fonds, mais aussi d'avoir le courage. Cela rejoint ce que je viens de dire. Le plus difficile, c'est d'avoir le courage, tout en revenant toujours à l'aspect financier. En tant que jeunes producteurs et entrepreneurs, nous avons forcément besoin de soutien. C'est très difficile. Il faut du courage et de la passion. Mais, en somme, nous avons besoin d'être soutenus pour pouvoir continuer à réaliser nos projets.

 

 

LP : Le ministère de la Culture lève des fonds chaque année pour soutenir des projets. Avez-vous présenté le vôtre aux autorités compétentes afin de bénéficier de ce soutien ?

SK : Au début, non. Le projet a été entièrement réalisé sur fonds propres. Cependant, pour la post-production, nous avons rencontré quelques difficultés. J'ai donc fait une demande de soutien au fonds SIC, auprès du ministère de la Culture. Mais notre requête a été classée sans suite, et je n'ai eu aucun retour.

 

 

LP : Où en êtes-vous avec le projet aujourd'hui ?

SK : Alors, nous étions au dernier FESPACO où nous avons obtenu le prix de l'Union européenne, une distinction spéciale du FESPACO, et un grand prix. Ensuite, nous avons été sélectionnés au festival Agna au Mali, en sélection officielle. Et actuellement, nous sommes invités au Festival de Cannes pour une projection privée au pavillon africain. Le film sortira au cinéma le 6 juin. C'est donc là que nous en sommes avec l'évolution du projet.

 

 

LP : Faites-vous donc partie de la délégation ivoirienne envoyée par le ministère de la Culture pour participer au Festival de Cannes ?

SK : Non, malheureusement, je n'en fais pas partie. Nous avons certes été invités pour une projection privée au pavillon africain, en présence de potentiels acheteurs internationaux, mais la situation est très compliquée. Tous les frais liés à Cannes (voyage, hébergement, et bien d'autres) sont à notre charge. Nous sommes donc en train de réunir les fonds nécessaires afin de pouvoir répondre à l'invitation, car de nombreux paramètres doivent être pris en compte avant de s'y rendre. Nous aurions bien aimé être présents du début à la fin du festival, mais nos ressources ne nous le permettent pas. La projection privée est prévue pour le 20 mai, nous ferons donc l'effort d'y être à temps.

 

 

LP : Quelle est la thématique abordée dans ce film qui, apparemment, fait sensation dans les festivals ?

SK : Le film aborde plusieurs thématiques. Principalement, ce que j'ai voulu mettre en avant, c'est une prise de conscience des jeunes face à certains fléaux comme la drogue, de plus en plus présente dans la vie de notre jeune génération, qu'il s'agisse des jeunes Ivoiriens, Africains, ou du monde entier. Le film explore la fraternité entre deux amis. Des liens de loyauté qui, malheureusement, mèneront au drame. Ce que je souhaite avant tout avec ce film, c'est d'éveiller les consciences : il faut bien réfléchir pour prendre de bonnes décisions. Et aussi, sensibiliser les jeunes aux dangers liés au monde de la drogue.

 

 

LP : Quel conseil pouvez-vous donner à tous ces jeunes qui vous suivent sur les réseaux et qui observent aujourd'hui votre évolution ?

SK : Le meilleur conseil que je puisse donner, c'est d'être courageux, car ce n'est pas facile. Il faut être courageux et faire ce qu'on a envie de faire. Je dirais à ces jeunes qui souhaitent évoluer de faire ce qui leur plaît, jusqu'à ce que cela plaise aux autres, et non l'inverse.

T. Samira (Stagiaire)