Ma Muse : Stop aux VBG et aux féminicides !

Ce samedi 8 mars, comme chaque année, le monde entier célébrera la Journée internationale de la femme. Chez nous, des festivités sont prévues, à travers le pays, avec à la clé des uniformes, des chants et des danses. Mais, derrière ces réjouissances se cache une réalité bien triste en Côte d’Ivoire : la recrudescence - effarante et inquiétante – des violences basées sur le genre, notamment les féminicides.
Et la dernière date, qui a eu pour théâtre la commune d’Abobo, s’est produite le dimanche 23 février 2025 et donne froid dans le dos. Ce jour-là, au quartier Terre-Rouge à N’dotré, Adou Ahou Djénéba, âgée de 39 ans, a été lâchement trucidée avec une arme blanche, sous les yeux de ses quatre enfants par son ex-conjoint, pour avoir mis fin à leur relation amoureuse devenue toxique. Elle a été poignardée à mort avec une hargne d’une rare violence d’un homme qui, pourtant, tentait désespérément de la reconquérir. Et deux enfants de la victime voulant arracher leur mère des griffes du meurtrier ont été aussi blessés... Six jours plus tôt, soit le 17 février, une femme enceinte de 29 ans échappait, miraculeusement, à un assassinat crapuleux. Elle n’a dû son salut qu’à ses voisins qui, alertés par ses cris de détresse, ont accouru pour la sauver des mains d’un adolescent d’à peine 17 ans qui tentait de… l’égorger ! Ce drame d’une cruauté quasi-bestiale et cette tentative d’assassinat déjouée sont symptomatiques du phénomène, hélas, prégnant des violences faites aux femmes dans notre pays. Et les chiffres sont alarmants. En 2023, 8662 cas de violences ont été signalés dont plus de 500 cas graves, y compris des féminicides. Et entre 2022 et 2024, l’Organisation pour la Réflexion et l’Action Féministe (ORAF) a recensé 46 cas de féminicides relayés par les médias : 12 en 2022, 18 en 2023 et 16 en 2024. Précision importante : 30,4 % des cas enregistrés concernent les filles âgées de 20 à 30 ans. D’après une enquête de l’ONG CPDEFM, en 2020, au moins 416 femmes ont perdu la vie dans des circonstances violentes liées à leur genre dans le District d’Abidjan. « En Côte d'Ivoire, une femme sur trois a été victime de VBG » révélait, récemment, la ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, Nassénéba Touré, lors d’une marche contre les VBG à Abobo. Des statistiques qui confirment bel et bien que la situation est malheureusement alarmante. Car, comme le note si bien Mme Nassénéba Touré, « ce sont des vies brisées, des enfants qui pleurent, des sœurs privées de leur avenir ». Il y a donc nécessité d’agir sur deux leviers majeurs : le premier, c’est naturellement la sensibilisation. La persistance du phénomène montre qu’elle doit être intensifiée car l’un des grosses pesanteurs de la lutte contre les VBG reste les règlements à l'amiable. Le défi, c’est amener les victimes à dénoncer avec courage les violences quand bien même l’auteur est un conjoint et surtout éviter qu’elles se claquemurent dans le silence. Se taire, c’est nourrir la culture de l’impunité, ouvrir la porte à d’autres coups et blessures voire meurtres. Le second, c’est évidemment le durcissement de la répression contre ces faits de violence d’une extrême gravité. Il appartient aux autorités de prendre toutes leurs responsabilités et d’être impitoyables avec ceux violentent et ôtent la vie des femmes. Car, rien, absolument rien, ne justifie cet acte ignoble. Les procédures judiciaires pour des cas de féminicides doivent être accélérées. Pourquoi ne pas par exemple prendre des lois spécifiques sur les féminicides ? A quoi bon de célébrer la femme, si après on la laisse se faire tabasser à mort ? En tout cas, il urge de passer la vitesse supérieure pour éviter que d’autres femmes ne perdent encore la vie du fait de ces violences gratuites et impardonnables. Trop, c’est trop !
Y. Sangaré