Interview-Dr Elvis Adjaffi (Directeur des Affaires juridiques et de la Coopération au ministère de la Culture et de la francophonie) : « La carte d’identité professionnelle a d’énormes bénéfices pour tous les artistes »

Le 11 juin dernier, le ministère de la Culture et de la Francophonie a organisé un atelier, à la Bibliothèque nationale, pour présenter aux faitières des organisations des arts et de la culture le mécanisme de professionnalisation de ce secteur. Dans cette interview, Dr Elvis Adjaffi, directeur des Affaires juridiques et de la Coopération au ministère de la Culture et de la Francophonie, explique l’intérêt de l’attribution d’une carte d’identité aux artistes professionnels de Côte d’Ivoire.

Interview-Dr Elvis Adjaffi (Directeur des Affaires juridiques et de la Coopération au ministère de la Culture et de la francophonie) : « La carte d’identité professionnelle a d’énormes bénéfices pour tous les artistes »
Pour Elvis Adjaffi, cette carte va permettre aux artistes de vivre décemment de leur art

Le Patriote : Quels sont les enjeux d’un tel atelier auquel vous conviez les différentes faitières des organisations des arts et de la culture ?

Elvis Adjaffi : Permettez d’abord que je commence par vous présenter le contexte de cette activité. On sait que la culture a une part  prépondérante dans le Pib (Produit intérieur brut) des pays. Que ce soit en Afrique, en Europe et partout. Dans le monde entier, il est de notoriété que la culture est présente partout. En France, par exemple, il y a eu un rapport sur le site du ministère français de la Culture qui dit que ce secteur d’activités a généré, pendant l’exercice 2020, 46,1 milliards d’euros;  ce qui tourne autour de 30.000 milliards de FCFA. Vous voyez qu’avec un exercice budgétaire de la culture, on éponge les dettes de plusieurs pays africains. Mais, en Côte d’Ivoire, il est clair que les artistes vivent difficilement de leur art. Pour leur permettre de vivre décemment de leur art, le Président de la République, S.e.m Alassane Ouattara, a signé, en 2021 un décret portant statut de l’artiste. Bien auparavant, les professionnels du secteur des arts et de la culture se disaient « artistes » mais, juridiquement, aucun document ne consacrait le métier d’artiste. C’est ainsi que le président de la République a pris la plein mesure de créer un métier, une profession d’artiste à travers le décret de 2021. Mais, ce décret qui est pris renvoie à un arrêté ministériel pour fixer les conditions de délivrance de la carte professionnelle d’artiste.

 

 

LP : Justement, que dit le décret ?

EA : Avec le décret, désormais, lorsqu’on fait les cartes nationales d’identité (Cni), au niveau des professions, on peut mentionner la profession : artiste. Mais, avec des déclinaisons. Il y a des artiste musiciens, comédiens humoristes, etc. Le décret de 2021 prévoit toutes ces catégories d’artistes.

Cette carte va permettre aux artistes de vivre décemment de leur art, surtout qu’elle a  d’énormes bénéfices pour tous les artistes.

 

 

LP : Concrètement, comment accède-t-on à ce statut d’artiste ?

EA : Prenons n’importe quel métier. Votre secteur d’activités des médias par exemple, il y a la profession de journaliste ! Pour exercer ce métier, il y a, naturellement, des conditions. Il y a ce qu’il faut faire pour dire qu’on est journaliste professionnel ou on est amateur. Si on est amateur, on n’a pas besoin d’une carte professionnelle.

C’est le même cas, dans le secteur de la culture désormais. Si on veut exercer la  profession d’artiste, il faut disposer d’une carte d’identité professionnelle,  puisque c’est un métier qui est règlementé aujourd’hui.

Il fallait donc faire des consultations avec les faitières des organisations artistiques, secteur par secteur, pour pouvoir déterminer ensemble les conditions de la délivrance de la carte professionnelle d’artiste. Depuis que Mme Françoise Remarck a été nommée ministre de la Culture et de la Francophonie, elle nous a donné un mot d’ordre clair qui est de professionnaliser le monde de la culture. On ne peut donc pas, soi-même, préparer les textes sans écouter ceux à qui ils seront appliqués. Il fallait donc recevoir les artistes, les écouter, échanger avec eux. C’est ce que nous faisons pendant ces deux jours.

Nous avons déjà effectué une première partie des consultations, il reste maintenant quatre (4) groupes à recevoir, c’est dans la continuité que s’inscrit la rencontre de ce jour avec les artistes musiciens.

 

 

LP : Revenons aux enjeux, après le contexte… 

EA : Les enjeux, c’est de fixer les conditions selon les secteurs de métiers relevant le statut de l’artiste et ensemble terminer le statut général.

Nous allons aussi faire en sorte que les acteurs s’approprient  les conclusions et résolutions de l’atelier qui fixe les règles de leur travail.

En Côte d’Ivoire, la carte professionnelle est un acte administratif.  En plus des conditions générales de son acquisition, il y a aussi les conditions spécifiques dans chaque secteur d’activités.  Mais, on leur présente d’abord le décret de 2021, parce qu’ils doivent le connaitre.

 

 

LP : Quelle sera la suite après ces rencontres sectorielles ?

EA : Après celles-ci, il y aura une rencontre générale avec tout le monde culturel pour présenter le fruit de nos réflexions, secteur par secteur.

Ce sont deux activités qui se déroulent en même temps. Il y a la question de la carte professionnelle, mais également, nous parlons du régime de prévoyance sociale de l’artiste.

 

 

LP : Mais, la question de la prévoyance sociale ne relève pas du ministère de la Culture !

EA : Il y a un communiqué interministériel voulu par nos deux ministres : la ministre Françoise Remarck et le ministre Adama Kamara qui ont réfléchi sur ce volet pratique de prévoyance sociale. Effectivement, ce n’est pas le ministère de la Culture qui gère ce volet prévoyance sociale. C’est pourquoi une équipe du ministère en charge de la prévoyance sociale est présente pour présenter la Cmu (Couverture maladie universelle), sous le leadership du ministre Me Adama Kamara. Elle va également expliquer le décret qui a institué le statut du régime social du travailleur indépendant. Il y a déjà eu un atelier, à Assinie, pour présenter cela et monter les bénéfices qui en découlent pour les artistes.

La ministre de la Culture a négocié pour qu’on ait un régime encore pour l’artiste parce qu’il y a le grand groupe des travailleurs indépendants, mais l’artiste c’est un autre groupe, qui ne vit que sur ses productions artistiques que sont les concerts.

 C’est là l’intérêt de la carte qui va permettre d’avoir un régime social de faveur pour l’artiste ivoirien.

En plus du régime social, la carte va permettre aussi aux artistes d’intégrer tous nos mécanismes de financement au niveau du ministère et ses partenaires.

 

Par Jean Antoine Doudou