Interview-Gédéon (Artiste chanteur, musicien) : « C'est unis qu'on peut continuer le développement de notre pays »

Koko Koffi Gédéon, plus connu par son prénom Gédéon, après plusieurs années aux États-Unis, est au pays. Dans cette interview, l’auteur des morceaux à succès : "J’aime la rose", "Maman",  etc. appelle les Ivoiriens à la conciliation et à privilégier les alliances interethniques. Il dévoile également son actualité musicale et la sortie prochaine de "Forever", son nouvel album. 

Interview-Gédéon (Artiste chanteur, musicien) : « C'est unis qu'on peut continuer le développement de notre pays »
L’artiste se dit inscrit dans le registre de ceux dont la musique traverse le temps 

Le Patriote : Les mélomanes ivoiriens n’avaient plus de vos nouvelles, quelle est votre actualité ?

Gédéon : Je vis désormais aux Etats-Unis. Je suis actuellement en Côte d’Ivoire pour faire le deuil de mon père et de ma mère rappelés à Dieu en mon absence. Sur le plan musical, je prépare un album qui sortira en février 2025. C’est un album de huit (08) titres qui sera intitulé « Forever » qui signifie « pour toujours ». 

LP : Après autant d’années, loin du public ivoirien, n’avez-vous pas d’appréhension quant à l’accueil de ce nouvel album ?

Gédéon : Non pas du tout. Vous savez, lorsqu’on fait des œuvres qui traversent le temps, on n’a pas à avoir des appréhensions. Je m’inscris dans la lignée des artistes dont les œuvres résistent à l’usure du temps. Bien qu'étant absent de la scène musicale ivoirienne, depuis un certain temps, il n'en demeure pas moins qu'à chaque grand rendez-vous comme la fête des mères, la Saint-Valentin et bien d'autres événements, on joue mes titres. C'est dire qu'il y a des œuvres qui résistent au temps.

LP : Oui, mais depuis votre absence, il y a d'autres genres musicaux qui ont pignon sur rue, notamment le Coupé décalé, le Rap ivoirien, etc. Pensez-vous que les mélomanes ivoiriens adopteront votre musique malgré l'influence de ces genres musicaux ?
Gédéon : Assurément oui ! Lorsqu'on part au marché, pour faire ses emplettes, il y a toutes sortes d'articles et chacun fait son choix selon ses besoins et ses envies. La diversité des genres musicaux participe au dynamisme du show-business ivoirien. La notoriété de certains artistes n'est pas forcément gage de qualité. Je reste persuadé qu'il y a un public pour le genre de musique que je propose.


LP : Lorsque vous partiez du pays, il était en crise. Qu'avez-vous constaté à votre retour ? 

Gédéon : Je pense qu'il y a des souvenirs qu'il ne faut pas ressasser. De ce qui m'a été donné de voir, je pense que la situation est beaucoup plus apaisée. Vous savez, je pense qu'on devrait remplacer l'expression réconciliation par celui de conciliation. Il faut poser les jalons de la conciliation pour ne pas avoir à parler de réconciliation, en mettant en avant les alliances ethniques, les parentés à plaisanterie qu'on appelle "Toukpê". Si j'ai un appel à lancer, ce serait que les Ivoiriens gagneraient à être ensemble. C'est en étant unis qu'on peut poursuivre le développement de notre pays la Côte d’Ivoire. Il faut qu'on puisse se mettre ensemble, taire nos différences lorsqu'il il s'agit de l'intérêt supérieur de la nation.


LP : Des artistes de votre génération ont tenté le retour sur la scène, mais le public n'a pas été très réceptif !

Gédéon : Un retour sur la scène musicale, après une longue période d'absence, se prépare en amont. Je ne dis pas que les autres ne l'ont pas fait. Mais moi, j'ai un staff qui travaille sur mon retour. Et nous préparons les choses avec minutie. C'est toute une stratégie que nous sommes en train de mettre en œuvre pour ce retour-là. J'ai conscience qu'il faut que je propose une œuvre discographique de grandes qualités pour, non-seulement, satisfaire mes fans qui ont attendu longtemps, mais également pour accroître le cercle de ceux qui apprécient ma musique.

LP : Dans la nouvelle génération d'artistes qui caracolent au sommet des hit-parades, y a-t-il quelques-uns dont vous appréciez la musique ?
Gédéon : Je peux citer, pêle-mêle, Ks Bloom, Dj Mix, Beby Philippe, Suspect 95 et bien d'autres. Ce sont des artistes qui font la fierté de la musique ivoirienne. Ce sont des jeunes au talent prometteur.

LP : Est-il possible de vous voir collaborer, via des featurings, avec ces jeunes ?
Gédéon : Ce n'est pas à exclure. Mais, pour l'album que je prépare, ce n'est pas le cas. Je reste dans mon registre musical. Le style que je fais peut-être apprécié par tout le monde. Autant par les anciens que les plus jeunes. Il ne s'agit pas de faire une collaboration pour être forcément dans l'ère du temps. Il y a des gens qui aiment les chansons qui font danser et d'autres qui aiment les chansons qui font penser. Chaque genre de musique a sa cible et son public. 

L.P : Quels conseils aux jeunes artistes chanteurs en votre qualité de devancier ?
Gédéon : Un seul. Ce serait de véhiculer des messages pour faire avancer le pays et le continent africain. Il est bien de faire danser, mais l'artiste a aussi pour vocation de contribuer à faire avancer les choses de façon positive.

LP : Aux Etats-Unis avez-vous une activité musicale ?
Gédéon : Oui, bien évidemment ! Je travaille avec des artistes américains. C'est même avec eux que je prépare mon futur album. Je participe à des festivals, des diners gala, etc. J'ai une bonne activité musicale qui me permet de faire des tournées.

LP : Comment votre musique est-elle perçue par le public américain ?
Gédéon: Plutôt bien. Et mon public est de toutes les races et nationalités. Il y a des Africains mais aussi des Américains. Il y a des blancs et des noirs. La musique n'a pas de frontières. Il suffit qu'elle soit bonne pour que n'importe quel type de public y adhère.

LP : Parlez-nous un peu de vos débuts dans la musique…
Gédéon : Élève déjà, comme tous les jeunes de ma génération, je faisais de l’"ambiance facile". Mon père était prédicateur protestant, donc je chantais dans la chorale de l'église. Et, des années plus tard, j'ai fait la rencontre de Thomas Brochard, un occidental qui m'a appris à jouer la guitare. Par la suite, j'ai joué dans des pianos bar pour peaufiner mon art. Et c'est dans l'un de ces établissements de nuit qu'un soir, j'ai fait la rencontre d'un avocat hollandais de passage à Abidjan qui a apprécié ce que je faisais et a décidé de me produire. C'est ainsi que j'ai enregistré mon titre "J'aime la Rose", arrangé par feu N'guessan Santa. Et en mai 1996 lorsque l'album est sorti, le succès a été immédiat. Quatre ans après, j'ai sorti "Racine carrée de moi c'est toi" dans lequel, il y a la chanson "Maman" qui a également connu un franc succès. Il y'a eu aussi "Ayela", etc. Chaque fois, le public a apprécié. Voilà résumé ma carrière musicale.

LP : La pop musique que vous pratiquez est assez peu commune ici. Pourquoi avoir opté pour ce genre musical ?

Gédéon : Ce n'est pas un choix en tant que tel. C'est venu naturellement à moi. Vous savez en général lorsqu'on joue à la guitare, on est enclin à un genre de musique un peu plus posé. L'instrument nous influence. Et moi, la guitare m'a conduit vers la pop musique de tendance folk song.

L.P : Quel regard portez-vous à l'évolution du show-business ivoirien ?

Gédéon : La musique ivoirienne se porte assez bien. Les choses avancent à grands pas. Il y a une effervescence qui fait plaisir. Partout on écoute la musique ivoirienne. La chanson "Coup de marteau" par exemple sortie à la faveur de la Coupe d'Afrique des nations a eu un écho partout dans le monde.


Réalisée par Jean Antoine Doudou