Transformation structurelle de l’économie ivoirienne : L’industrie agroalimentaire se développe à grands pas

Transformation structurelle de l’économie ivoirienne : L’industrie agroalimentaire se développe à grands pas

L’accélération de la transformation structurelle de l’économie ivoirienne voulue par le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, passe inévitablement par le développement de l’industrie qui constitue un défi majeur. L’objectif premier est d’accroitre la part du secteur industriel dans le PIB. De 26%, le gouvernement ambitionne de le porter à 40% à l’horizon 2030. En seconde position, à moyen terme, le gouvernement prévoit de rehausser à 50% le taux de transformation des principales matières premières agricoles, avec un grand focus sur le secteur de l’agroalimentaire. 
En effet, inscrite dans le premier pilier du Plan national de développement (PND 2021-2025), la politique d’industrialisation accorde une place de choix à l’agro-industrie qui constitue l’une des sept grappes industrielles à développer. Cette stratégie vise un développement intégré de la chaîne agroalimentaire en vue de renforcer sa contribution à la croissance, à la création d’emplois décents, mais aussi de réduire la fracture des importations de produits alimentaires, ainsi que de diversifier et accroitre les exportations. Ces dernières années ont vu le développement de l’agro-industrie s’accélérer avec l’installation de nombreuses usines de transformation et complexes industriels, notamment dans le secteur du café-cacao, de la filière cajou et de la filière riz.

Secteur du cacao


Avec une capacité de broyage de 962 000 tonnes en 2022, la Côte d’Ivoire est devenue le leader mondial de broyage de fèves de cacao. L’on dénombre, à ce jour, quatorze unités de transformation de cacao fonctionnelles dans le pays. Elles sont partagées entre les géants industriels dont Barry Callebaut, Olam International et Cargill. La dernière à être inaugurée en 2023 est la société GCB Cocoa Côte d’Ivoire. Installée à San-Pedro, cette usine dispose d’une capacité de 60 000 tonnes par an. En novembre 2021, la société Cargill a augmenté sa capacité de production de 50%, passant de 110 000 tonnes à 170 000 tonnes avec l’extension de son site industriel situé à Yopougon. Avec cette extension, le site se classe parmi les plus grandes usines de broyage de cacao au monde. 
La Société Africaine de Cacao (SACO), filiale du géant suisse Barry Callebaut, a aussi installé une nouvelle usine de transformation du cacao en beurre, tourteaux et poudre de cacao d’une capacité de broyage de 40 000 tonnes dans la capitale économique en mars 2019. Dans la périphérie d’Abidjan, dans la zone industrielle d’Akoupé-Zeudji, la construction de la future usine de transformation de fèves en beurre et poudre de cacao du groupe Jbcocoa se poursuit. Avec une capacité initiale de production de 50 000 tonnes de fèves de cacao par an et un investissement estimé à 39 milliards de FCFA, l’usine verra le jour d’ici à fin décembre 2024.

Filière cajou
Tout comme le secteur du cacao, la filière anacarde n’est pas en reste dans cet élan de développement agroindustriel. Premier producteur mondial de noix de cajou avec une production de 1,225 million de tonnes en 2023, la Côte d’Ivoire veut rehausser son rang sur le segment de la transformation des noix de cajou. Le pays est le troisième acteur mondial derrière le Vietnam et l’Inde. A cet effet, plusieurs mesures et initiatives ont été prises par le gouvernement, principalement, la construction de trois zones industrielles dédiées à l’anacarde dans les villes de Bondoukou, Séguéla et Korhogo, dont la zone a été inaugurée en septembre 2023. Elle s’étend sur 28,7 hectares et prévoit abriter sept (7) unités de transformation, des entrepôts de stockage, un espace de séchage, un centre de valorisation des coques de cajou et une station d’épuration des eaux usées. La construction de ces zones industrielles s’inscrit dans le cadre du Projet de promotion de la compétitivité de la chaîne de valeur de l’anacarde (PPCA) initié en 2018 avec le soutien de la Banque mondiale et mis en œuvre par le Conseil du coton et de l’anacarde (CCA). Ces zones permettront, ainsi, de créer un marché local de commercialisation de l’anacarde du fait des transformateurs qui y seront installés, et des capacités de stockage qu’elles offrent aux acheteurs et aux coopératives des régions. Elles permettront également de créer des emplois permanents pour les jeunes et les femmes. 
A ce jour, on dénombre 36 usines de transformation de noix de cajou à travers le pays pour une capacité globale de 350 000 tonnes par an à fin 2023 contre environ 77 384 tonnes par an en 2014, une augmentation de 306% en dix ans. Le taux de transformation de la noix de cajou est passé de 9% en 2019 avant d’atteindre 22% en 2023. Le mercredi 19 juin 2024 à Odienné, le ministre du Commerce et de l’Industrie, Souleymane Diarrassouba procédait à l’inauguration de l’usine de la société ECOCAJOU dont la capacité nominale de transformation s’élève à 15 000 tonnes de noix brutes par an. La société prévoit, ainsi, créer environ 840 emplois, avec à terme la création de 2000 emplois directs et plus de 5000 emplois indirects dans la région du   K a b a d o u g o u .   E n   2 0 2 0 ,   l e   C e n t r e   d  i n n o v a t i o n s   e t   d e   t e c h n o l o g i e s   d e   l  a n a c a r d e   ( C I T A )   a   o u v e r t   s e s   p o r t e s   à   Y a m o u s s o u k r o   a v e c   u n e   c a p a c i t é   d e   t r a n s f o r m a t i o n   d e   6   0 0 0   t o n n e s   p a r   a n .   
E n   2 0 2 2 ,   l a   v i l l e   d e   T o u m o d i   a   a c c u e i l l i   l e   c o m p l e x e   i n d u s t r i e l   «      D o r a d o   I v o r y      » ,   f i l i a l e   d u   g r o u p e   R o y a l   N u t s   P T E   L t d   b a s é   à   S i n g a p o u r .   A v e c   p l u s   d e   2 0 . 0 0 0   t o n n e s   a u   d é m a r r a g e   d e   s e s   a c t i v i t é s ,   l a   c a p a c i t é   d e   t r a n s f o r m a t i o n   d e   c e t t e   u s i n e   s e r a   p o r t é e   à   5 0 . 0 0 0   t o n n e s   d e   n o i x     b r u t e s   d e   c a j o u   p a r   a n   l o r s q u  e l l e   a t t e i n d r a   s a   v i t e sse de croisière. A côté de ces unités industrielles, l’on ajoute l’usine OLAM d’Anyama (ex-UNICAFÉ) qui traite 15.000 tonnes par an et emploie 750 personnes. Dans le nord du pays, la ville de Boundiali bénéficie aussi d’une usine de transformation de noix de cajou, dont le coût est estimé à environ 15 milliards de francs CFA. Située dans le village-communal de Tombougou-Samorosso, cette usine est bâtie sur une superficie de 10 hectares, avec une capacité de traitement de 50 tonnes/jour, et va générer près de 6.000 emplois directs et 10.000 indirects. Avec toutes ces unités installées et d’autres en construction, le gouvernement ambitionne d’atteindre un taux de transformation de 50% de la production locale d’ici à 2030.

Filière rizicole
Outre ces matières premières, la transformation locale concerne également le riz. Dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de développement de la filière riz, le gouvernement veut accroître la production à travers la transformation locale du paddy. Le Conseil des ministres a adopté, en début du mois août 2024, un décret portant approbation des contrats de cession des activités industrielles et de location des terrains et bâtiments composant les unités industrielles de transformation de riz dans 10 localités à des opérateurs économiques. Il s’agit des villes de San Pedro, Dimbokro, Boundiali, Adzopé, Ferkessédougou, Daloa, Saïoua, Séguéla, et Vavoua. Ces 10 unités industrielles d’une capacité de transformation individuelle de 5 tonnes par heure amorcent le maillage industriel de 30 unités prévues qui permettront d’assurer la couverture des besoins en consommation avec une production nationale de riz blanchi de bonne qualité et à même de garantir des stocks de sécurité nécessaires. « Cette action vise à renforcer les capacités opérationnelles de nos exploitants agricoles, suivant les axes de croissance de la filière riz définis dans le cadre de la mise en place de la politique gouvernementale de développement de la riziculture en Côte d‘Ivoire », avait justifié le ministre d’État, ministre de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières, Kobenan Kouassi Adjoumani, lors de la remise desdits contrats aux opérateurs. Dans le cadre de la stratégie de développement du riz, la Côte d’Ivoire dispose, à ce jour, de sept (7) centres de production de paddy de très bonne qualité, mais également de (7) centres de production de semences certifiés et 4 laboratoires de certification. 

Grâce à la volonté du gouvernement et les réformes engagées, le secteur de l’agro-industrie connaît une véritable ascension ces dernières années. Avec une forte diversification de l’agriculture et la croissance de la production de plusieurs cultures comme le cacao, l’hévéa et l’anacarde, le secteur est attiré par les investisseurs étrangers. Sur les 10 premiers mois de 2022, le secteur agroindustriel a attiré environ 450 milliards FCFA d’investissements, soit 63 % du total des investissements agréés selon les chiffres du Centre de promotion des investissements privés en Côte d’Ivoire (CEPICI).

Sogona Sidibé