Sécurisation foncière rurale : Un atelier pour prévenir les conflits et renforcer la transparence

Sécurisation foncière rurale : Un atelier pour prévenir les conflits et renforcer la transparence
L’atelier, porté par l’AFOR et le groupement ENVIROX/BEATITUDES, a mis en lumière les avancées, les défis et les espoirs d’un territoire en quête d’apaisement (Ph DR)

Le lundi 13 octobre 2025, dans la commune de Cocody à Abidjan, un atelier d’une portée symbolique et stratégique s’est tenu à l’initiative de l’Agence foncière rurale (AFOR), en partenariat avec le groupement ENVIROX/BEATITUDES. Ce rendez-vous, consacré à la restitution et à la validation du rapport provisoire de l’évaluation sociale du Programme national de sécurisation foncière rurale (PNSFR), s’inscrit dans le cadre du Programme d’appui à la sécurisation foncière rurale (PASFOR), financé par l’Agence française de développement (AFD) dans le cadre du 3ᵉ Contrat de désendettement et de développement (C2D).

Dans une salle empreinte de gravité et de responsabilité, les représentants du ministère d’État, du ministère de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières, les membres du corps préfectoral, les élus, les cadres, les médiateurs régionaux, les autorités coutumières et les acteurs de la société civile ont répondu présents. Tous portaient une même préoccupation : celle de garantir que la sécurisation foncière ne devienne jamais une source de fracture sociale, mais bien un levier de paix et d’inclusion.

Prenant la parole au nom du directeur général de l’AFOR, le conseiller technique Edy Amon a rappelé que « la sécurisation foncière rurale, si elle n’est pas menée avec une vigilance sociale et environnementale absolue, peut générer de nombreux déséquilibres ». Il a souligné que cette évaluation sociale, exigée par l’AFD et conduite par le groupement ENVIROX/BEATITUDES, vise à anticiper les risques, à renforcer les dispositifs existants et à garantir une prise de décision responsable. L’objectif est clair : prévenir les conflits, réduire la vulnérabilité des groupes et assurer l’inclusion de toutes les communautés.

Le rapport présenté repose sur une enquête de terrain menée en juillet 2025 dans les départements de Ferkessédougou, Sinématiali, Katiola, Béoumi et Botro, auprès de 763 personnes. Il met en lumière des avancées significatives : une réduction de 15 points du taux de litiges fonciers, une augmentation de la participation des femmes dans les Comités Villageois de Gestion Foncière Rurale (passée de 20 % à 35 %), une implication accrue des jeunes dans la reconnaissance des droits coutumiers (25 % des détenteurs de certificats fonciers), la sécurisation de 150 000 hectares de parcelles, et une réduction de 40 % des erreurs de saisie grâce aux outils numériques. Ces progrès ont renforcé la confiance des populations, notamment grâce à la transparence des processus.

L’étude révèle également que les plateformes de dialogue mises en place ont permis de résoudre 70 % des conflits à l’amiable. Toutefois, elle pointe des défis persistants : des disparités régionales dans la couverture cadastrale, des zones sous-équipées en services fonciers, des tensions dans les territoires à faible reconnaissance coutumière, un besoin de formation continue et un suivi post-délivrance des certificats encore insuffisant.

Face à ces constats, les participants ont formulé des recommandations concrètes : revoir les procédures de l’AFOR pour identifier les insuffisances, consolider les typologies de litiges en mettant l’accent sur les zones sensibles, spécifier les plans d’action par département avec des mesures d’atténuation, renforcer la sécurisation des espaces pastoraux, intégrer davantage les leaders locaux dans les opérations de terrain, supprimer les dispositions juridiques en contradiction avec les pratiques coutumières et favoriser les synergies entre les actions pour une meilleure efficacité.

Le rapport a été validé par l’ensemble des parties prenantes, sous réserve de l’intégration des observations formulées. Il constitue désormais une boussole pour la mise en œuvre du PASFOR, qui prévoit la certification de plus de 500 000 hectares sur un potentiel de 950 000, la délimitation des territoires de 264 villages, la délivrance de 40 000 certificats fonciers – dont au moins 20 % aux femmes – la formalisation de 15 000 contrats agraires et la formation de plus de 3 000 acteurs du foncier rural.

Au-delà des chiffres, cet atelier a réaffirmé une conviction partagée : la terre est bien plus qu’un bien à sécuriser. Elle est mémoire, lien, avenir. Et c’est ensemble, dans le respect des voix locales et des équilibres sociaux, que se construit une Côte d’Ivoire apaisée et inclusive.

OUATTARA Gaoussou