Non, Gbagbo ne devrait pas dire cela !

Non, Gbagbo ne devrait pas dire cela !
Gbagbo Laurent a tenu un discours haineux, irresponsable, appelant à la violence

En politique, la parole devrait être un guide, une lumière éclairant les citoyens vers un avenir meilleur. Pourtant, elle devient trop souvent un instrument de division, d’exagération et de manipulation. Lorsque la sagesse fait défaut dans les discours des dirigeants, c’est la confiance publique qui s’effrite.

Laurent Gbagbo, dans sa quête effrénée de pouvoir et sous la pression du moment, semble oublier que ses paroles ont un poids considérable auprès de ses partisans. Une déclaration mal pensée peut attiser les tensions, accentuer les clivages ou instiller le doute là où l’unité devrait prévaloir. Trop souvent, l’art de la mesure et du respect cède le pas aux slogans faciles et aux formules choc, sacrifiant ainsi la raison sur l’autel de l’émotion. La vérité se trouve déformée par la manipulation, avec la volonté implicite de réécrire l’histoire à son avantage, quitte à travestir les faits et à flirter avec le mensonge.

C’est un constat : évincé du pouvoir après une cuisante défaite électorale et militaire, Laurent Gbagbo nourrit une rancœur tenace. Celle d’un homme désorienté, ébranlé, qui rêve de reconquérir une Côte d’Ivoire qu’il a échoué à gouverner, la transformant en un foyer de violences et de crimes odieux. À la clé, une crise postélectorale—dont il porte l’entière responsabilité—ayant coûté la vie à plus de 3 000 personnes, selon les chiffres officiels, bien que le nombre réel de victimes soit certainement plus élevé.

Samedi, le président du PPA-CI a renforcé cette image d’un homme perdu. Face à environ 3 000 partisans, il a tenu un discours belliqueux, totalement déconnecté des réalités et des enjeux du pays, lequel s’est imposé comme la locomotive de la sous-région sous l’impulsion du Président Alassane Ouattara. Morceaux choisis : « S'ils veulent qu'on se batte, alors on se battra. Allez-leur dire qu'ils m'ont cherché, ils m'ont trouvé…» ; « Vous venez trouver un fils authentique chez lui. Et vous voulez le piétiner chez lui. Mais non. Ça ne peut pas se passer comme ça » ; « Tu viens et tu dis que ton candidat est décédé, Amadou Gon Coulibaly. Donc vraiment, ça te fait pitié. Tu ne pouvais pas faire autrement. Aujourd'hui, Amadou Gon Coulibaly est encore décédé ? » ; « Quand tu viens me parler à moi, Gbagbo le fils de Koudou, pour dire que je ne peux pas être candidat là, il faut bien regarder ton slip, ton pantalon » ; « À Abidjan, ici, on dit que c'est le premier couillon qui est couillon. Le deuxième couillon n'est pas couillon » ; « Et eux, ils ont inventé un droit foireux, bizarre, nul, pour dire que voilà, comme il y a eu une nouvelle Constitution. Mais ça, c'est quoi ça ? » ; « Parce qu'ils croient qu'on a peur de dire mais à un moment, il faudra qu'on envahisse toutes les rues d'Abidjan»…

Des propos surprenants et surréalistes de la part d’un ancien chef d’État, qui a déjà conduit le pays au chaos. Manifestement, Laurent Gbagbo n’a tiré aucune leçon de son éviction, de son séjour en détention à La Haye, ni des erreurs qui ont précipité sa chute. Son rejet par les urnes s’explique par l’instauration d’un régime fondé sur la xénophobie, le tribalisme et la violence, en plus des nombreux scandales financiers qui ont entaché son mandat.

Soyons clairs : la responsabilité d’un homme d’État ne se limite pas à ses décisions, elle inclut également la manière dont il s’exprime. Des paroles sages et réfléchies sont le socle de la stabilité et de la cohésion nationale. À l’inverse, une parole politique imprudente alimente la défiance, fragilise les institutions et expose la société aux dérives. C’est précisément ce que l’on constate chez Laurent Gbagbo, dont les déclarations, dépourvues de mesure et de sens, sont déconnectées des réalités du peuple ivoirien.

Un ancien chef d’État d’un pays aussi influent, grand et respecté que la Côte d’Ivoire, devrait, à chaque prise de parole, mesurer l’impact de ses mots et veiller à leur portée. Tous les combats ne méritent pas d’être menés—surtout ceux qui, dès leur amorce, s’annoncent sans issue.

 

Charles SANGA