L’illusion des réseaux sociaux

« Les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d’imbéciles qui, avant, ne parlaient qu’au bar, après un verre de vin, et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd’hui, ils ont le même droit de parole qu’un prix Nobel. »
Cette citation, ô combien pertinente, de l’écrivain italien Umberto Eco résume parfaitement la problématique liée à l’utilisation des réseaux sociaux.
Cet outil numérique de communication – et aussi de mise en relation – a radicalement bouleversé la prise de parole publique. Désormais, n’importe qui peut s’exprimer librement sur tous les sujets, qu’il en maîtrise ou non la teneur, dire tout et n’importe quoi sur qui et sur quoi.
Certains se sont transformés en justiciers, prompts à réagir sur tout et sur rien, pour défendre les causes souvent dans les excès, les injures et la manipulation. D’autres, par calcul politique et cynisme, surfent sur les polémiques pour gagner la sympathie du public, prenant soin, avec une dose de populisme et de manipulation, de noircir la réalité, y compris les évidences les plus incontestables.
Ainsi, certains croient avoir trouvé dans ces plateformes digitales, qui ont profondément modifié les rapports humains, un baromètre leur permettant de mesurer leur ancrage et la pertinence de leur prise de parole, tandis que d’autres y voient l’occasion rêvée de bâtir une communauté de militants et de construire une notoriété.
C’est le cas de certains acteurs politiques d’ici ou d’ailleurs qui, parce qu’ils disposent de milliers de « followers » et sont flattés par les « likes » qui pleuvent sur leurs publications, se croient investis d’un destin national, voire présidentiel.
Mais entre le monde virtuel et le monde réel, il y a un fossé énorme que seul le terrain permet de combler. Et aujourd’hui, des politiciens ivoiriens 2.0 font l’amère expérience de cette réalité.
Notamment ceux d’entre eux qui ont choisi de briguer la magistrature suprême.
Rêvant de devenir président, sans équipe, ni moyens, ni vision, ils éprouvent d’énormes difficultés à récolter les parrainages d’électeurs, incapables d’obtenir 1 % de lectorat dans au moins 17 Régions et Districts autonomes du pays. Système institué par le législateur afin de limiter les candidatures fantaisistes et réserver l’élection présidentielle aux candidats disposant d’une véritable implantation nationale.
Cela traduit une popularité très discutable et une assise politique localisée ; surtout, cela montre qu’ils se laissent griser par les réactions des internautes sur les réseaux sociaux. Qui, en vérité, ne sont qu’une vision trompeuse, voire une illusion optique.
Certes, ces nouveaux médias sont incontournables pour transmettre des messages et communiquer. Mais ils ne définissent pas réellement l’influence d’un acteur politique sur le terrain.
En politique, ces politiciens « digitalisés » l’apprennent à leurs dépens, le terrain et le contact direct commandent.
Ce ne sont pas les incantations sur la toile ou les médias qui font gagner une élection.
S’il y a un parti politique sur la scène nationale qui en donne régulièrement la preuve, c’est bien le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP).
Bien qu’il soit incontestablement la première force politique du pays, comme en témoignent ses victoires probantes à toutes les élections depuis 2010, le RHDP ne se repose pas sur ses lauriers ou ne se contente pas des prises de position sur les réseaux sociaux.
Sous l’impulsion de son leader, le Président Alassane Ouattara, il travaille sans relâche à renforcer son ancrage, aussi bien dans les grandes villes que dans les zones rurales.
De même, il se remet en question quand cela s’impose, opère sa mue et se fixe de nouveaux défis à relever. Objectif : garder le contact permanent avec les militants.
Par exemple, en février 2022, le parti a lancé une vaste restructuration, avec en toile de fond une réorganisation en profondeur de son architecture : du Directoire aux Comités de base, en passant par le Secrétariat exécutif, les Coordinations régionales, les Secrétaires départementaux, les Délégués de zone, les Secrétaires de section, etc.
Le RHDP a également lancé l’opération E-militant, qui a permis de constituer une base solide de plus d’un million de militants actifs, répertoriés et identifiés.
En somme, un matelas confortable d’électeurs captifs, qui constitue un atout non négligeable lors d’un scrutin.
De plus, le RHDP aborde chaque échéance électorale avec rigueur et méthode, et il n’a pas dérogé à ses habitudes pour l’élection présidentielle du 25 octobre 2025.
Depuis plusieurs mois, le parti d’Alassane Ouattara prépare activement cette échéance. Il a d’abord mobilisé et organisé ses militants pour la révision électorale, puis pendant le contentieux électoral.
Aujourd’hui, les houphouëtistes sont en ordre de bataille pour la collecte des signatures en vue du parrainage citoyen, ultime étape avant le dépôt de la candidature d’Alassane Ouattara à la Commission Électorale Indépendante (CEI).
Une stratégie huilée, avec pour objectif une victoire écrasante et éclatante du candidat du RHDP au soir du 25 octobre 2025.
À l’évidence, une élection ne se gagne pas sur la toile. Encore moins sur les réseaux sociaux, qui sont, comme le dit si bien Axel Dauchez, fondateur d’un site internet de consultation citoyenne, « un moyen puissant de communiquer, pas plus ».
Une leçon à méditer pour les politiciens des temps nouveaux…
Charles SANGA