PDCI : Après le désaveu de ses proches, Thiam a-t-il encore le contrôle ?

PDCI : Après le désaveu de ses proches, Thiam a-t-il encore le contrôle ?
Le PDCI en roue libre sous Thiam

Le masque est tombé. Ce mardi 11 juin, lors de son habituel « one-man show » diffusé depuis la France où il s’est replié après sa radiation de la liste électorale, Tidjane Thiam a livré une déclaration aussi ahurissante que révélatrice : en tant que président du PDCI-RDA, il n’était pas au courant — ou du moins pas informé à temps — de la notification de sanctions prises contre Valérie Yapo-Thiam, qu’il dit pourtant avoir formellement interdites.

« Il y a des gens au PDCI qui font n’importe quoi. Toute l’affaire Valérie Yapo, c'est parce que il y a eu des coups fourrés. Moi, j’avais dit : ne prenez aucune sanction. Je l'ai dit pour Billon, ne prenez aucune sanction. Parce que leur but, c'est de nous amener au tribunal. C’est dans les journaux que j’ai appris qu’on avait signifié à Valérie Yapo la décision la concernant que j'avais interdite », a lâché, sans filtre, l’ancien banquier d’affaires, visiblement dépassé. Ces propos, loin de calmer le jeu, jettent une lumière crue sur le dysfonctionnement de la direction du PDCI. Comment comprendre que des collaborateurs prennent des décisions contraires à ses instructions, en toute impunité ? Le PDCI-RDA est-il devenu un navire à la dérive où chacun joue sa propre partition pendant que le capitaine regarde ailleurs ? Ce qui frappe, au-delà du contenu des déclarations, c’est leur légèreté. Thiam semble découvrir en direct l’étendue de la cacophonie qu’il préside. Plutôt que de reprendre la main et trancher, il s’enferme dans une posture de victime impuissante. 

Pire encore : ce désaveu public de ses proches collaborateurs, dans une affaire aussi sensible que celle des sanctions internes, soulève une question capitale – et qui dépasse le cadre partisan. Quel type de chef d’État Tidjane Thiam prétend-il incarner, s’il est incapable de faire respecter sa parole dans son propre parti ? Un président de la République peut-il se permettre de découvrir les décisions de ses équipes dans les journaux ? Et surtout, peut-il se contenter de les commenter sans les corriger ? En d'autres termes, quelle correction a-t-il apporté à de tels dysfonctionnements ? L’affaire Valérie Yapo-Billon, au départ purement interne, devient ainsi le révélateur d’un mal plus profond : un leadership défaillant, une autorité contestée, un parti livré aux luttes intestines. À quelques mois de l’élection présidentielle, cela ressemble à un très mauvais signal. Thiam voulait parler à ses militants ; il vient surtout de confirmer à toute la Côte d’Ivoire que le PDCI souffre d’un grave vide de commandement. À vouloir trop jouer sur l’image, Tidjane Thiam oublie que la politique, ce n’est pas seulement la communication. C’est aussi, et surtout, l’autorité, la responsabilité et le courage de trancher. Des qualités qui, pour l’instant, semblent lui échapper. En tout cas, après cette sortie du président Thiam, on est en droit de se demander qui entre lui et ses "roperos" (courtisans), pour reprendre l'expression du ministre Jean Louis Billon, contrôle le parti.

 

Rahoul Sainfort