Interview-Tuo Siaka (sous-directeur de la circulation urbaine à l’Office de sécurité routière) : « Le piéton qui marche sur la chaussée alors qu’un trottoir est disponible est passible d’une amende »

Sous-directeur de la circulation urbaine, Tuo Siaka revient, dans cette interview, sur la mesure d’amende forfaitaire de 2 000 FCFA applicable aux piétons en infraction, son fondement juridique, les comportements ciblés, et les modalités de mise en œuvre. Il évoque également les missions de l’OSER, ses actions de terrain et les défis persistants dans la lutte pour une circulation plus sûre.

Interview-Tuo Siaka (sous-directeur de la circulation urbaine à l’Office de sécurité routière) : « Le piéton qui marche sur la chaussée alors qu’un trottoir est disponible est passible d’une amende »
 « Le piéton, en faute, doit s’acquitter de l’amende selon les modalités définies par l’administration »

Le Patriote : Vous avez annoncé, il y a quelques mois, que les piétons seront soumis à une amende forfaitaire de 2 000 FCFA pour non-respect du code de la route. Quel est le fondement juridique de cette mesure ?

Tuo Siaka : Cette mesure n’est pas nouvelle car elle date de 1964 et trouve son fondement juridique dans le décret n° 64-212 du 26 mai 1964, portant réglementation de l'usage des voies routières ouvertes à la circulation publique. La question des piétons est abordée dans l’article 46 qui indique que « Tout usager doit, sauf cas de force majeure, emprunter exclusivement les chaussées, pistes ou trottoirs affectés à la circulation des usagers de sa catégorie ». Egalement à l’article 247 : « Constituent des contraventions de première classe et sont punies comme telles d'une amende de 200 à 2 000 francs inclusivement les infractions aux dispositions du présent décret et à celles des arrêtés pris pour son application, commises par les piétons et les usagers de la voie publique circulant à cycle, lorsqu'elles n'entrent pas dans les catégories prévues à l'article 246 ».

Comme vous pouvez le constater, ces dispositions ont été reprises dans le décret n°2016-864 du 3 novembre 2016 portant règlementation de l'usage des voies routières ouvertes à la circulation publique (article 53 et 258) et le décret n° 2022-631 du 3 août 2022 modifiant le décret n°2016-864 du 3 novembre 2016 qui revalorise les amendes. L’annexe à ce dernier décret fixe à 2 000 FCFA l’infraction portant sur le non-respect pour l’usager de circuler sur la catégorie de voie qui lui est affectée.

 

LP : Quels sont, précisément, les comportements des piétons qui sont passibles de cette amende ?

TS : Dans le Code de la route, la voie destinée aux piétons est le trottoir. La chaussée, c’est pour les véhicules. Donc, le piéton qui marche sur la chaussée alors qu’un trottoir est disponible est passible de cette amende. Le fait de traverser la route en dehors d’un passage piéton ou des feux piétons ; le fait de ne pas emprunter un pont piéton pour traverser une voie lorsqu’il en existe à proximité ; circuler sur une autoroute… sont des comportements pour lesquels le piéton peut être interpellé. Il y a aussi le non-respect des feux de signalisation pour piétons et le non-respect des instructions d’un agent de police régulant la circulation.

 

LP : Concrètement, comment cette mesure sera-t-elle appliquée sur le terrain ? Quels sont les agents habilités à verbaliser les piétons et selon quelles procédures ?

TS : Cette mesure sera appliquée par l’interpellation et la notification au piéton de son infraction sur place. Les forces de l’ordre notamment la police et la gendarmerie peuvent constater les infractions de visu, puis dresser un procès-verbal sur place et le piéton doit s’acquitter de l’amende selon les modalités définies par l’administration (paiement immédiat ou via une procédure administrative ultérieure). S’il ne paie pas sur place, l’agent de contrôle peut retirer sa pièce d’identité ou tout autre document permettant de l’identifier.

 

LP : Comment l'OSER compte-t-il s'assurer que cette mesure ne devienne pas une source de corruption ou d'abus de pouvoir de la part des agents chargés de l'appliquer ?

TS : L’OSER s’attèle toujours à sensibiliser tous les usagers de la route aux bonnes pratiques de la sécurité routière. Un accent particulier sera mis sur la vulgarisation des infractions liés aux piétons qui sont des usagers vulnérables afin d’aboutir au strict respect des dispositions les concernant. Si les piétons sont bien informés et respectueux du code de la route, il n’y aura pas d’infractions et cela éviterait tout abus des forces de l’ordre.

 

LP : Pouvez-vous nous dire quelles sont les missions de l’OSER ainsi que les activités qu’il mène sur le terrain ?

TS : Les missions de l’OSER sont de collecter et traiter les données d’accidents et de produire des statistiques ; réaliser des audits et procéder à des inspections de sécurité routière ; étudier et proposer des plans de circulation ; vérifier la conformité de la signalisation routière, etc. En matière d’activités, nous faisons beaucoup de sensibilisation. Nous organisons des campagnes de sensibilisation à l’occasion des grandes fêtes religieuses, de fin d’année et des grands événements sportifs, culturels, etc. ainsi que dans des écoles.

L’OSER organise également des sessions de formation à l’attention des professionnels du secteur des transports dont les gestionnaires des entreprises de transports à l’obtention de l’attestation de capacité professionnelle (ACP) ; les conducteurs professionnels à l’obtention du certificat d’aptitude de conducteur routier (CACR) ; et aussi des  formations pour les moniteurs d’auto-école ; des session de renforcement de capacités pour les conducteurs routiers et les conducteurs de véhicules de transports des élèves et étudiants.

Nous avons plusieurs projets majeurs en cours. Notamment, la mise en œuvre de la stratégie nationale de sécurité routière (SNSR) 2021-2025 ; l’élaboration de programmes pour l’enseignement de l’éducation routière en milieu scolaire (inscrit au projet PTUA) ; la mise en place d’un logiciel de collecte et de traitement des données d’accidents en temps réel (inscrit au PTUA) ; et la mise en place d’un centre multimédia pour la récupération des points perdus sur les permis de conduire.

 

LP : Quels sont les défis auxquels l'OSER est confronté dans sa mission de réduction des accidents de la route et de leurs conséquences ?

TS : Le principal défi auquel l'OSER est confronté, c’est le problème de ressources financières. Les fonds alloués à la sécurité routière ne sont pas assez suffisants pour faire lutter efficacement contre l’incivisme sur la route.

 

Sogona Sidibé