Contribution - Côte d’Ivoire : Quand la magistrature suprême appelle au sens du sacré
Dans cette contribution, Norbert Kobenan, communicateur de formation, stratège en communication institutionnelle et ancien conseiller technique chargé de la Communication au cabinet du ministre Charles Koffi Diby, insiste sur l’importance qu’il faut accorder à la fonction du Président de la République…

La Côte d’Ivoire entre dans une séquence cruciale de son histoire démocratique. Comme à chaque échéance, les candidatures à la magistrature suprême se multiplient. Si cette vitalité démocratique témoigne d’une certaine ouverture politique, elle soulève également une inquiétude de fond : prenons-nous la mesure du sérieux et de la solennité que requiert une telle ambition ?
Candidater à la fonction de Président de la République, ce n’est pas simplement remplir un dossier administratif. C’est poser un acte républicain majeur, aux résonances institutionnelles, morales, symboliques et internationales.
- Le respect des institutions commence par le respect de la fonction
Le Président de la République n’est pas un citoyen parmi d’autres : il est le dépositaire vivant des Armoiries, de l’unité nationale et du destin collectif. Et pourtant, à chaque échéance, l’on voit apparaître des candidatures parfois anecdotiques, folkloriques ou volontairement provocatrices, comme si la magistrature suprême était devenue un terrain de démonstration personnelle ou un tremplin de visibilité.
> Le respect des institutions commence non pas au jour du serment, mais dès le dépôt de candidature.
Chaque geste compte : la manière de se présenter, la posture, la tenue, le langage, l’accompagnement, le silence ou le vacarme médiatique. Tout candidat à la présidence parle déjà au peuple avant même d’avoir prononcé un mot.
- Les Armoiries ne sont pas un décor, mais un sceau sacré
La méconnaissance – voire l’indifférence – à l’égard des Armoiries de la République, du code vestimentaire protocolaire, du langage symbolique de l’État, ou des rites républicains est une alerte préoccupante. On ne se présente pas à la fonction de Chef suprême des Armées, garant du fonctionnement des institutions, représentant de la nation, comme à une interview d’embauche ou à une performance sur les réseaux sociaux.
> Être candidat, c’est déjà incarner quelque chose de plus grand que soi.
- Tout le monde peut-il être Président ?
Théoriquement, en démocratie, la fonction est ouverte. Mais cela ne signifie pas que tout le monde y est prêt. Être Président, ce n’est pas être célèbre. Ce n’est pas avoir un bon slogan. Ce n’est pas seulement être contre le système. C’est porter le pays, ses douleurs, ses symboles, sa jeunesse, ses silences, ses cicatrices et ses rêves.
L’irruption d’un certain amateurisme, voire d’un populisme burlesque dans les candidatures, n’est pas simplement risible : elle est une insulte implicite au suffrage universel, au sérieux de l’État et à la mémoire des générations passées.
- La candidature est un message, un miroir, un acte de foi civique
Chaque candidature présidentielle véhicule un message. Même dans le silence, un prétendant à la magistrature suprême parle par ses choix, son comportement, son respect des règles, son sens du symbole.
Le dépôt de candidature est en soi un acte politique. La présentation du dossier, le respect du drapeau, l’attitude dans les médias, la posture face aux institutions : tout cela forme une liturgie républicaine, qu’il faut célébrer avec gravité, élégance et patriotisme.
- Quel message envoyons-nous à nos enfants ?
Si la plus haute fonction du pays devient un spectacle où l’on improvise, se met en scène, ou se moque de l’autorité, quel message semons-nous dans la tête de nos jeunes ?
« À chaque situation, son rituel. À chaque rituel, son sens. À chaque sens, sa mémoire. »
En banalisant la Présidence, on banalise la République.
En négligeant le protocole, on affaiblit l’État.
En tournant en dérision les institutions, on creuse le lit du chaos.
- Appel à la responsabilité et au sursaut éthique
Ce cri n’est pas un rejet de la pluralité politique. Il est un appel au retour du sacré républicain, un cri silencieux en faveur de la dignité, une alerte citoyenne contre le délitement du respect institutionnel.
> On ne bâtit pas un pays sur l’ironie, mais sur la verticalité morale.
On ne gouverne pas un peuple par des caricatures, mais par des convictions enracinées dans la vérité, la mémoire, et le respect. Un poste sacré exige des candidats consacrés. La Côte d’Ivoire mérite mieux que des candidatures improvisées. Elle mérite des hommes et des femmes conscients de la charge, respectueux des codes, habités d’un amour sincère pour la nation, et capables d’inspirer confiance par leur posture avant même leur programme.
> On ne joue pas avec le fauteuil présidentiel. On s’en approche avec le cœur pur et les mains propres.
Que ceux qui aspirent à la plus haute fonction soient d’abord les premiers à honorer les plus hautes exigences.
Par Norbert KOBENAN