Ma muse : L’ADU, c’est quoi le problème ?
Acheter un terrain en toute sécurité reste une vraie problématique en Côte d’Ivoire. Pour ne pas dire un grand risque. Tant les conflits fonciers sont légion, et le secteur du foncier est infesté d’escrocs de tout acabit. De beaux parleurs qui vendraient du caillou au prix d’un diamant. Des experts en falsification passés maîtres dans l’art d’imiter des signatures ou de produire de faux documents administratifs.
Ainsi, de potentiels acquéreurs se font gruger avec des parcelles vendues à plusieurs personnes ; des papiers de terrain qui puent le faux etc. Pour certains infortunés, c’est l’économie de toute une vie qui s’est volatilisée. Pour d’autres, ce sont des prêts bancaires qui se sont évanouis dans la nature et qu’ils devront travailler, le restant de leur existence, pour rembourser. Des victimes qui songent parfois à se suicider pour échapper à un « enfer sur terre » : le déshonneur, la faillite… Bref, tout ce qu’il faut pour casser le moral et enlever toute envie de vivre.
Faut-il rester silencieux face à cette situation alarmante et laisser des familles être détruites par ces arnaqueurs, dont la place est en prison ? Assurément non ! Car, un Etat qui se respecte ne saurait fermer les yeux devant ces chapardages organisés. C’est pourquoi, le gouvernement a décidé, à travers le ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme (MCLU), de poser le garrot pour stopper la saignée, en instituant l’ADU (Attestation de droit d’usage coutumier), en remplacement des traditionnelles attestations villageoises peu sûres parce que non uniformisées et sujettes à la falsification. Comme il en existe beaucoup de cas pendants devant les juridictions compétentes.
Avec l’ADU, instaurée en mai 2023 puis entrée en vigueur depuis le 1er juillet 2024, les transactions foncières sont désormais fiables. Car, elle est sécurisée avec un code QR, un identifiant unique et des stickers. Ce qui signifie clairement : « un terrain, une ADU ». Autrement dit, l’ADU ne peut être délivrée à deux personnes. De plus, l’ADU est établie par la tutelle et remise à chaque chefferie en fonction du nombre de lots approuvés au sein du lotissement. Pourquoi alors tant d’agitations autour d’un document qui sécurise à la fois le vendeur et l’acheteur ? Et surtout empêcher les larrons de sévir.
De toute évidence, les réserves de certaines communautés villageoises, notamment du District autonome d’Abidjan, sur l’ADU intriguent, et suscitent des interrogations sur leurs intentions. En quoi l’ADU crée « des incompréhensions, des inquiétudes et ne donnent aucune garantie aux propriétaires terriens» comme les chefs Atchans et Akyé ont pu le dire au Premier ministre, le vendredi 3 janvier dernier, lors d’une rencontre ?
Disons-le tout net, c’est une peur injustifiée car, en aucun cas, le MCLU se substitue aux chefs pour la vente des parcelles. Ce qu’il souhaite, avec l’ADU, c’est qu’il n’y ait plus de duperie. Se braquer contre l’ADU, c’est nourrir la suspicion, du reste, légitime, que des gens profitent des magouilles actuelles et qu’ils ont intérêt que le milieu ne soit pas assaini. Et c’est dommage, voire inacceptable. Le MCLU ne doit donc pas se laisser émouvoir par ces cris d’orfraie. Qui ne cachent que de noirs desseins.
Y. Sangaré