Réintégration des migrants : La Côte d'Ivoire trace une nouvelle voie

Réintégration des migrants : La Côte d'Ivoire trace une nouvelle voie

Un tournant majeur dans la gouvernance migratoire du pays. Les 4 et 5 juin dernier au Plateau et à l’Institut Goethe, l’organisation Stay in Africa et le ministère délégué auprès du ministère des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et des Ivoiriens de l’extérieur ont co-organisé une conférence nationale sur la réintégration des migrants. Placée sous le signe de la reconstruction, de la dignité et du développement, cette rencontre a réuni des acteurs institutionnels et associatifs engagés pour une prise en charge plus efficace des migrants de retour.

A l’ouverture de la conférence, Koné Siaka, président de Stay in Africa, a rappelé que la migration est une réalité humaine aux conséquences profondes. Il a souligné que chaque migrant revenu au pays porte en lui une histoire de rupture, mais aussi un potentiel sous-estimé : savoir-faire, force mentale et expertise élargie.

"La réintégration ne doit pas être vue comme une charge, mais comme un levier pour la cohésion sociale, l’économie locale et notre avenir collectif", a-t-il affirmé. Stay in Africa, organisation pionnière dans l’accompagnement des migrants, met ainsi en œuvre des actions de prévention des départs précaires, tout en facilitant leur retour par une prise en charge psychosociale, juridique et médicale.

Depuis sa création, plus de 5 000 migrants ont été accompagnés dans 15 régions du pays. Mais les défis restent immenses, d’où l’importance de renforcer la synergie entre les acteurs et d’accélérer l’adoption de politiques publiques adaptées.

Pour répondre à ces défis, Stay in Africa a présenté plusieurs initiatives. Ce sont, entre autres, le programme Espace Bambou qui prévoit la formation et l’incubation de 500 porteurs de projets d’ici 2025, avec 750 millions de FCFA de fonds dédiés ; la création d’un observatoire national des migrations pour mieux anticiper les dynamiques migratoires et l’établissement de la Maison du Retour, conçue comme un guichet unique d’accompagnement. On note également le plaidoyer pour l’adoption d’une loi cadre sur la réintégration, afin de reconnaître les droits et parcours des migrants de retour.

Directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et des Ivoiriens de l’extérieur, Goly Philippe a insisté sur la nécessité d’une approche intégrée et harmonisée. "Un arbre sans racines ne résiste pas aux tempêtes", a-t-il rappelé, soulignant l’importance de reconstruire les bases sociales et économiques des migrants de retour.

Pour lui, la réintégration réussie passe notamment par la facilitation de l’accès à l’emploi et à l’entrepreneuriat grâce à des formations qualifiantes et des partenariats public-privé ; la lutte contre la stigmatisation des migrants de retour via des campagnes d’information et de sensibilisation et la  mobilisation de la diaspora pour faire de ces migrants des modèles inspirants et moteurs du développement.

Gaoussou Karamoko, directeur général des Ivoiriens de l’extérieur, a également plaidé pour une meilleure coordination des actions, afin que la réintégration ne soit ni une sanction, ni un enfermement.

"Le migrant de retour n’est pas une personne ‘normale’ qui revient simplement chez elle. Il revient avec un vécu complexe, parfois marqué par des traumatismes profonds", a-t-il souligné, insistant sur l’accompagnement psychologique et identitaire nécessaire à leur reconstruction.

Cette conférence a permis de renforcer le pacte national et international sur la question migratoire, dans un esprit de solidarité et de progrès social. Le gouvernement ivoirien, sous la vision du Président de la République Alassane Ouattara, s’engage ainsi à structurer un cadre durable de réintégration sociale et économique, à mobiliser davantage de ressources pour les programmes existants et à accélérer la mise en œuvre de mesures concrètes, avec des échéances précises et un mécanisme de suivi efficace.

 

Yves Kalou