Aviculture : Une thèse démontre le lien entre biosécurité et rentabilité des fermes

Protéger ses volailles, c’est protéger son revenu : une thèse en fait la démonstration. C’est le message fort qui ressort de la soutenance de thèse de M. Abe Shon Roland, coordonnateur du Programme d’Appui à la Production Avicole Nationale (PAPAN), tenue le 28 juillet dernier à Bingerville. Intitulée « Analyse économique des effets de la biosécurité sur la productivité des exploitations avicoles de la Côte d’Ivoire », la thèse met en lumière un lien direct entre les pratiques de biosécurité et la rentabilité des fermes avicoles, en particulier celles de petite taille.
La biosécurité, telle que définie dans la thèse, regroupe l’ensemble des pratiques visant à empêcher l’introduction et la propagation de maladies dans les exploitations agricoles. Cela inclut le port de tenues de travail spécifiques (blouses, bottes, combinaisons), la désinfection systématique des chaussures et équipements, le contrôle strict des accès aux bâtiments d’élevage, la séparation entre vêtements de ville et tenues de ferme.
« Quand la maladie entre sur une ferme, elle est foudroyante. Vous perdez tout en un seul temps », a rappelé M. Abe Shon Roland lors de sa soutenance. L’étude s’appuie notamment sur l’épisode de la grippe aviaire de 2024, qui a entraîné l’abattage de près de 750 000 volailles en Côte d’Ivoire. L’État a débloqué plus d’un milliard FCFA en indemnisation, mais comme le souligne le chercheur : « L’indemnisation n’est pas un remboursement. C’est un appui pour redémarrer, et il n’est pas automatique. Pendant ce temps, l’activité est à l’arrêt. »
La thèse démontre que les exploitants qui investissent dans la biosécurité réduisent considérablement les risques sanitaires, améliorent la qualité et la valeur marchande de leurs animaux, assurent une continuité de production, même en période de crise et augmentent leurs revenus nets, grâce à une meilleure productivité.
« La biosécurité améliore la rentabilité et le revenu de l’éleveur. Quand les animaux sont en bonne santé, ils se vendent mieux, et l’investissement est protégé », explique M. Abe.
L’étude révèle cependant une faible adoption des mesures de biosécurité chez les petits exploitants, souvent par manque de moyens ou de sensibilisation. « Le petit exploitant pense d’abord à son revenu immédiat. Il ne voit pas l’intérêt d’investir dans la prévention », déplore le chercheur.
Au-delà du diagnostic, la thèse propose des recommandations concrètes : adapter les formations aux réalités des éleveurs, développer des politiques publiques incitatives et mettre en place des mesures de biosécurité sur mesure, selon le type et la taille de l’exploitation. « On ne peut plus former pour former. Il faut tenir compte des réalités de chaque éleveur pour concevoir des programmes efficaces », affirme M. Abe Shon Roland.
La soutenance a été saluée par le jury présidé par le Pr Alban Ahouré, Dg de la CAPEC (Cellule d’analyse des politiques économiques du CERES) pour sa pertinence scientifique et son potentiel d’impact sur les politiques agricoles. La mention très honorable a été décernée à la thèse. En tant que coordonnateur du PAPAN, Abe Shon Roland entend désormais traduire ces résultats en actions concrètes, au service de l’aviculture ivoirienne.
Yves Kalou