Interview-Bamba Cheick Daniel (Directeur Général de l’AFOR) : « Le PRESFOR est le plus gros projet foncier jamais réalisé en Afrique sur financement de la Banque Mondiale »
L’Agence foncière rurale (AFOR) a été créée, par décret du 3 août 2016, dans le but d’accélérer le processus de sécurisation du foncier rural. Préfet hors grade, ancien ministre de l’Administration territoriale, Bamba Cheick Daniel a été choisi pour conduire la toute nouvelle structure en charge d’adresser la question du foncier rural. Huit années après, à quel niveau se trouve la sécurisation foncière rurale et quelles sont les perspectives ? Dans cette interview, la première depuis sa prise de fonction, le Directeur général de l’AFOR, le ministre Bamba Cheick Daniel, dit tout.
Le Patriote : Monsieur le Directeur Général, le foncier rural représente environ 23 millions d’hectares soit presque 70% du territoire de la Côte d’Ivoire. Quelles en sont les problématiques spécifiques ?
Bamba Cheick Daniel : La croissance démographique et les phénomènes migratoires tant internes qu’externes ont intensifié la pression foncière en milieu rural, ce qui a accru la compétition pour le contrôle des terres, socle du développement de la Côte d’Ivoire, essentiellement basé sur l’agriculture. Cette compétition sur les terres a augmenté les risques de conflits fonciers entre les communautés, au sein des communautés, entre les familles et même au sein des familles, faisant ainsi peser une réelle menace sur la paix et la cohésion sociale dans les villages et sur toute l’étendue du territoire national. Cette situation est exacerbée par les transactions non-règlementaires sur les terres rurales. L’instabilité socio-politique, constatée ces dernières années dans la sous-région ouest-africaine, n’est pas faite pour arranger les choses, avec le déplacement massif des populations en situation de précarité, vers des zones propices comme la Côte d’Ivoire.
En outre, dans certaines régions, en raison des survivances traditionnelles, l’appropriation individuelle de la terre est difficilement admise. Lorsque cela est admis, c’est en général au profit des hommes et des aînés, excluant de fait les femmes et les jeunes de l’exercice de droits fonciers autonomes.
De plus, en dehors des zones où l’État met en œuvre des opérations de sécurisation foncière rurale, les populations rurales détenant des droits fonciers coutumiers s’intéressent très peu à la procédure d’enregistrement de leurs droits conformément à la législation et à la réglementation en vigueur soutenues par la loi N° 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural. Cette situation s’explique par la méconnaissance des textes régissant le domaine foncier rural.
Globalement, le foncier rural constitue une question existentielle pour la Côte d’Ivoire et qu’il convient de l’adresser avec rigueur afin de consolider la paix et la cohésion sociale, promouvoir l'investissement et la productivité dans le secteur agricole, et lutter durablement contre la pauvreté.
"La création de l’AFOR répond à la volonté du chef de l’Etat de prévenir durablement les conflits liés à la terre dans les zones rurales du pays"
LP : L’AFOR a été créée par décret du 3 août 2016, dans le but d’accélérer le processus de sécurisation du foncier rural. Pouvez-vous nous préciser son fonctionnement et ses missions ?
BCD : La création de l’AFOR répond à la volonté du Chef de l’Etat, Son Excellence Monsieur Alassane OUATTARA, de prévenir durablement les conflits liés à la terre dans les zones rurales du pays. Ainsi, créée par le décret n° 2016-590 du 3 août 2016, la principale mission de l’Agence foncière rurale, en coordination avec le corps préfectoral, est de sécuriser toutes les terres du domaine foncier rural à travers la mise en œuvre de la loi n°98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural.
Il importe de signaler la caractéristique éminemment notable de ladite loi en ce qu’elle fut une première dans l’histoire législative de la Côte d’Ivoire, adoptée à l’unanimité par l’ensemble des parlementaires, tous partis politiques confondus, suite à des missions parlementaires à travers toutes les régions du pays pour recueillir les observations, avis et recommandations des populations, pour reconnaitre définitivement le droit foncier coutumier.
Placée sous la tutelle technique du ministère en charge de l’Agriculture, l’AFOR fonctionne à travers deux grands organes : le Conseil de surveillance et la Direction générale. Elle est chargée notamment d’exécuter les actions de sécurisation du foncier rural, notamment par la conclusion de conventions ; de conseiller les pouvoirs publics sur toutes les questions liées à la gestion du domaine foncier rural ; de mener des actions d’information et de sensibilisation des populations et de former les acteurs de la mise en œuvre de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural ; de contribuer au règlement des conflits fonciers ; de promouvoir la formalisation de la contractualisation des rapports entre propriétaires et exploitants non-propriétaires de terres rurales ; de mettre en place un système d’informations foncières rurales et d’en assurer la gestion ; d’assurer la veille du marché foncier rural.
L’AFOR est le maître d’œuvre du Programme national de sécurisation foncière rurale (PNSFR). Elle est chargée de la mise en œuvre des orientations stratégiques de la Politique foncière rurale.
LP : Huit ans après sa création, quel bilan faites-vous et quelles sont, à vos yeux, les réalisations les plus importantes à mettre à l’actif de l’AFOR ?
BCD : L’AFOR a tenu tous les paris par une accélération et une massification des opérations de sécurisation foncière rurale. Je voudrais toutefois préciser que l’AFOR a certes été créée en 2016, mais le bilan que nous vous communiquons maintenant est celui de cinq années de fonctionnement. Après sa création en effet, le Chef de l’Etat s’est imposé une année de réflexion avant de nommer ses principaux dirigeants en août 2017. Le président et les membres du Conseil de surveillance, le Directeur général que je suis et mon adjoint, avons été installés à la mi-septembre 2017, puis le temps de trouver des bureaux et recruter le personnel, nos activités ont véritablement débuté en juillet 2018.
Alors que nous déployions nos équipes dans les différentes régions du pays pour réaliser nos objectifs au bénéfice des populations rurales, survint le COVID en décembre 2019. Nos activités de terrain sont ainsi arrêtées de février 2020 à mars 2021, conformément aux mesures de restriction prises par le gouvernement et le Conseil national de sécurité. Vous constatez bien qu’il s’agit d’un bilan de cinq ans dont les résultats globaux enregistrés par l’AFOR, à la date du 30 novembre 2024, cumulent à 57 171 certificats fonciers délivrés dont 33% à des femmes, contre 3 920 en 2016 avant la création de l’agence. Nous enregistrons 5 325 territoires de villages délimités et bornés, soit 62% des 8 636 villages officiels que compte le pays. Nous comptons 41 415 contrats agraires conclus contre aucun avant la création de l’AFOR et avons créé 7 960 comités villageois de gestion foncière rurale sur 8 636, avec un taux de 93% de réalisation. Aujourd’hui, nous avons 463 comités sous-préfectoraux de gestion foncière rurale créés sur 507, soit 91% de réalisation et 22 200 acteurs et professionnels de la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural, qui ont bénéficié d’une formation dont 18% de femmes sur une prévision de 50 000, soit 44, 4% de réalisation. En termes de ressource humaine qualifiée pour la gestion du foncier rural ivoirien, nous disposons de 505 auditeurs dont 178 femmes, soit 35%, qui ont bénéficié d’une formation professionnelle et diplômante dans le cadre du partenariat conclu par l’AFOR avec des universités et grandes écoles telles l’Université Alassane Ouattara de Bouaké, l’Ecole supérieure d’agronomie de l’INP-HB et l’Institut national professionnel agricole (INFPA).
A ce niveau, nous 52 bureaux fonciers ruraux construits pour la gestion de la documentation foncière et la facilitation des processus sur une prévision de 507, soit 10, 3% de réalisation. Ces bureaux n’existaient pas avant la création de l’AFOR. Nous avons mené 102 missions d’information et de sensibilisation organisées dans les différents départements du pays sur une prévision de 110, soit 93% de réalisation.
Vous noterez également, la création du Système d’informations du foncier rural (SIFOR), base de données performante pour la traçabilité de tous les processus de délimitation des territoires de villages, de délivrance de certificats fonciers et de signatures de contrats agraires. A ce jour, nos équipes s’attèlent à enregistrer toutes les dernières données dans le SIFOR. Cette base de données peut être consultée à tout moment par les Magistrats, les officiers de police judiciaire et tout citoyen désireux d’avoir des informations sur un dossier de certificat foncier ou de délimitation de territoire d’un village. Avec la présence de l’AFOR, le nombre de certificats fonciers a été multiplié par 15 en cinq ans.
Le Directeur Général de l’AFOR et le ministre d’Etat Kobenan Kouassi Adjoumani (Ph DR)
LP : La question du genre dont vous parliez. Avec la rigidité des coutumes dans plusieurs régions du pays, les femmes n’ont pas droit à la terre !
BCD : Malheureusement, c’était le cas hier. Aujourd’hui, je vous invite d’ailleurs à mener votre enquête dans les régions du pays pour le constater par vous-même, les lignes bougent considérablement. A force de sensibilisation, d’échanges et de rencontres sous diverses formes avec toutes les parties prenantes de la chaîne foncière rurale, la place de la femme dans les questions de terre a été reconsidérée. Elle est aujourd’hui au centre des intérêts avec 33% de femmes qui ont obtenu leurs certificats fonciers sur 57 171 personnes qui détiennent ce document à ce jour.
Nous sommes allés plus loin pour maintenir durablement la femme dans le processus, en les incluant dans les sessions de formation organisées chaque année à l’endroit des acteurs des zones rurales. Sur les 22 000 acteurs formés à cette date, 18% de femmes l’ont été, pour connaître leurs droits dans la procédure et servir de relais d’information pour leurs sœurs et mamans dans les villages. L’AFOR s’est dotée d’un service genre pour travailler au quotidien à améliorer ses chiffres pour que dans les cinq prochaines années, l’accès de la femme à la terre soit dans l’ordre des choses banales.
"Avec la présence de l’AFOR, le nombre de certificats fonciers a été multiplié par 15 en cinq ans"
LP : Quelles stratégies ont permis d’obtenir ces résultats ?
BCD : D’importants outils d’optimisation de la sécurisation foncière rurale ont été mis en place. Il s’agit notamment d’un manuel des opérations intégrées de sécurisation foncière rurale. Au dela des textes légaux et réglementaires, l’AFOR met à la disposition des acteurs de la chaine foncière rurale un guide pratique de référence pour la conduite d’opérations intégrées de sécurisation foncière rurale (ingénierie socio-foncière, délimitation des territoires de villages, certification foncière et contractualisation agraire).
Nous avons adopté une approche systématique d’enregistrement des droits sur les terres rurales qui permet d’accélérer et de massifier les opérations. Cette approche consiste à prendre en compte de façon exhaustive l’ensemble des parcelles foncières et des ayants-droits d’un même village ou d’une sous-préfecture.
Il y a la mise en place d’une cellule d’innovations et de veille technologique (CIVT) au sein de l’AFOR pour assurer la recherche appliquée et le développement expérimental des innovations en matière de sécurisation foncière rurale ; du développement des technologies et procédés spécifiques en vue de réduire les délais et les coûts et d'améliorer la qualité des opérations et du développement de dispositifs innovants de contrôle automatisé des opérations de sécurisation foncière rurale.
Sans oublier l’adoption des outils d’ingénierie socio-foncière pour préparer le terrain et créer les conditions favorables à la mise en œuvre des opérations ; la mise en place du SIFOR pour contrôler, centraliser et gérer les données cartographiques et socio-foncières à l’échelle nationale ; l’amélioration de l’infrastructure géodésique nationale pour faciliter les rattachements du parcellaire et la conception d’applications informatiques pour dématérialiser la collecte des données socio-foncières (DIGIFOR) et pour automatiser le contrôle des données cartographiques (SCCARTO), avec un gain de temps important. JE le disais tantôt, nous avons procédé à la mise en place de bureaux fonciers ruraux dans les villages et sous-préfectures pour faciliter le suivi des opérations de sécurisation foncière rurale. Au sein de l’AFOR, nous avons créé un service genre dédié à faciliter et à favoriser l’accès des femmes à la propriété foncière, en plus de la prise en compte des aspects sociaux et environnementaux dans la sécurisation foncière rurale et de la formation de 50.000 acteurs du foncier rural et de ressources humaines dédiées au foncier rural. A cet effet, nous avons 505 étudiants formés dans des établissements partenaires.
LP : De plus en plus, il est question des ambitions du Programme national de sécurisation foncière rurale pour la période 2023-2033. Pouvez-vous nous les résumer ?
BCD : La Côte d’Ivoire s’est dotée d’une Stratégie nationale de sécurisation foncière rurale (SNSFR) et d’un Programme national de sécurisation foncière rurale (PNSFR) adoptés en Conseil des ministres le 15 juin 2023. La SNSFR a pour objet de définir le cheminement qui permettra de réaliser les objectifs du PNSFR. Elle fixe un cap, une durée et une cadence, à savoir accélérer et massifier les processus pour sécuriser tous les droits exercés sur les 23 millions d’hectares de terres du domaine foncier rural sur une période de dix ans (2023-2033). Les actions du PNSFR sont organisées selon les 4 axes de la SNSFR.
L’axe n°1 est liée à la massification et à l’accélération des opérations de sécurisation foncière rurale par la certification foncière de 23 000 000 hectares soit 1 500 000 certificats fonciers, l’achèvement de la délimitation des territoires des 8 636 villages officiels, le développement de la contractualisation écrite concernant l’usage des terres rurales, soit un objectif de 1 500 000 contrats agraires à signer et la prise de dispositions spécifiques en faveur des femmes et des jeunes.
Cet objectif s’appuiera sur l’adoption d’approches innovantes de sécurisation foncière rurale rappelée au début de notre entretien.
L’axe n°2 fait référence au renforcement de la gouvernance du domaine foncier rural par l’amélioration du cadre juridique en adaptant les textes existants au contexte et aux réalités actuels et la prise de nouveaux textes pour faciliter l’application de la loi relative au domaine foncier rural et le renforcement du cadre institutionnel par un appui à tous les acteurs.
L’axe n°3 est relatif à l’intensification des campagnes de communication et de formation par la mise en place d’un plan de communication et d’un plan de formation adaptés aux besoins des programmes et projets de sécurisation foncière rurale.
Et l’axe n°4 concerne le financement adéquat de la politique foncière rurale par le développement et la diversification des mécanismes de financement de la sécurisation foncière rurale, de sorte à le rendre pérenne à travers notamment les contributions des filières agricoles, des secteurs miniers ou industriels et la mise en place d’un fonds pour la sécurisation foncière rurale afin de sanctuariser les ressources financières et fluidifier leur mise à disposition des projets de sécurisation foncière rurale.
En outre, il convient de noter que notre politique foncière rurale a été bien réfléchie pour être en phase avec les instruments juridiques et autres documents de référence au niveau national, régional et international.
Dans le cadre du PNSFR, les certificats fonciers seront délivrés gratuitement aux demandeurs exerçant des droits coutumiers sur les terres rurales.
" La gratuité du certificat foncier est irréversible."
LP : Vous venez de souligner la gratuité du certificat foncier. Le document est gratuit dans certaines régions et pas dans d’autres. Comment expliquez-vous cette situation ?
BCD : Plusieurs contingences pourraient expliquer le peu d’engouement des populations pour se faire établir le certificat foncier, au nombre desquelles le coût jugé trop élevé des procédures. La question du coût du certificat foncier et de son financement sont une préoccupation pour le gouvernement qui cherche les voies et moyens en vue de le rendre accessible au plus grand nombre d’Ivoiriens du monde rural dont les revenus sont encore réputés modestes. Sur proposition de l’AFOR, le ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières, s’est saisi de la question en travaillant avec le soutien du gouvernement, pour rendre le certificat foncier gratuit à échelle.
Avec le soutien des partenaires techniques au développement comme la Banque Mondiale, la gratuité du certificat devient de plus en plus une réalité. Hier, c’était l’expérimentation de la gratuité dans six régions avec le PAMOFOR. Les bons résultats enregistrés, par le PAMOFOR, ont permis d’obtenir de la Banque Mondiale, un projet plus ambitieux qui est le Programme de renforcement de la sécurisation foncière rurale (PRESFOR), qui rendra le certificat foncier gratuit dans 16 régions du pays sur la période 2024-2029.
Dans la même dynamique et sur la même période, le certificat foncier sera gratuit dans quatre autres régions avec l’appui budgétaire de l’Agence française de développement (AFD) sur le foncier rural. L’AFOR est également en train de conclure un projet avec la Banque Allemande de Développement (KFW) pour la délivrance gratuite de certificat foncier dans les départements de Gagnoa et d’Oumé. Je n’oublie pas les projets Côte d’Ivoire Land Partnership (CLAP) et Promotion d’une Politique foncière responsable (ProPFR) exécutés dans les régions de Soubré, Divo, Guiglo avec le soutien de MERIDIA, de la Coopération allemande GIZ et qui contribuent également à massifier la délivrance du contrat agraire et du certificat foncier. Pendant les cinq prochaines années, le CF sera gratuit pour les bénéficiaires dans 21 régions sur les 31 que compte le pays.
La gratuité du certificat foncier est irréversible. Dans les deux tiers des régions du pays, le document est gratuit. Le ministère d’Etat, ministère de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières et l’AFOR, mettent en place les mécanismes de financement avec le concours des partenaires techniques au développement, pour que toutes les régions du pays bénéficient de la gratuité dans les prochaines années.
LP : De ce qui précède Monsieur le Directeur général, quels sont les défis à relever à court terme ?
BCD : A court terme, l’une des priorités demeure l’adressage de la problématique du financement pérenne des opérations de sécurisation foncière rurale à travers la mobilisation de ressources propres et de ressources budgétaires nationales. La problématique du foncier rural doit être inscrite au rang des priorités nationales, pour qu’à l’horizon 2033 la mise en œuvre du PNSFR soit une réalité à l’effet d’asseoir un climat de paix durable dans les zones rurales du pays.
Deux problèmes majeurs sont également à prendre en compte pour réussir la mise en œuvre du PNSFR. Il s’agit de la brûlante question de la colonisation du domaine foncier rural de l’Etat par des clandestins et de l’épineuse question de l’orpaillage clandestin avec ses effets destructeurs du foncier.
LP : En termes de perspectives, le PRESFOR a été lancé le 18 juillet dernier. A quoi doivent s’attendre les populations et quels sont les autres projets majeurs à implémenter par l’AFOR ?
BCD : Le Programme de renforcement de la sécurisation foncière rurale (PRESFOR) s’inscrit dans les importantes actions à mettre en œuvre dans le cadre du PNSFR, tout comme les autres projets. Le PRESFOR, qui a officiellement démarré ses activités, le 18 juillet 2024, par la cérémonie de lancement organisée à Guiglo, couvrira la période 2024 à 2029. Il est financé sur un prêt de la Banque Mondiale et concerne 16 régions du pays que sont le Bafing, le N’Zi, La Mé, l’Agnéby-Tiassa, l’Indénié-Djuablin, le Sud-Comoé, le Poro, le Tchologo, le Tonkpi, le Worodougou, le Gontougo, le Moronou, le Loh-Djiboua, La Nawa, le Guémon et le Cavally.
Ces régions couvrent 52 départements, 218 sous-préfectures, 3 353 villages. Il permettra de délivrer 500 000 certificats fonciers sur une superficie de 5 000 000 hectares, la délimitation de 1 502 territoires de villages et de faire signer 250 000 contrats fonciers entre les acteurs du foncier.
"Le Chef de l’Etat a été clairvoyant en créant l’AFOR, pour adresser la problématique de la sécurisation foncière rurale."
Le PRESFOR est le plus gros projet foncier jamais réalisé en Afrique sur financement de la Banque Mondiale. Les opérations techniques de terrain débuteront dans le mois de février 2025. Bien plus encore, au-delà des objectifs axés sur le foncier rural, le PRESFOR s’inscrit dans le cadre des efforts du Président de la République, SEM Alassane Ouattara, pour réduire la pauvreté, lutter contre le changement climatique et renforcer la résilience des populations à travers la création, dans chaque région, d’emplois directs et indirects, des débouchés offerts à l’agriculture et aux biens et services produits localement et la valorisation de la culture et des particularités régionales.
L'AFOR a procédé au lancement du PRESFOR à Bondoukou pour ce qui concerne la région du Gontougo (Ph DR)
Au niveau de l’employabilité notamment, c’est le lieu pour moi d’inviter tous les présidents des conseils régionaux, à saisir l’opportunité offerte par le PRESFOR afin de renforcer les compétences de milliers de jeunes de leurs régions et à promouvoir leur insertion professionnelle dans les secteurs de la géomatique, du foncier et du BTP sur une période de cinq ans, en synergie avec les opérateurs fonciers qui seront dédiés aux différentes régions. Le président du Conseil régional du Tchologo, le ministre d’Etat, ministre de la Défense, Monsieur Téné Birahima Ouattara, est en train de réussir l’insertion professionnelle dans les métiers du foncier des jeunes de sa région grâce au PRESFOR. C’est un bel exemple à suivre.
A côté de ce programme ambitieux, nous avons le Financement budgétaire - Programmatique foncier (FB-PR Foncier), mis en œuvre grâce à l’appui financier de l’AFD. Ce programme débute effectivement en 2025 et s’étendra jusqu’en 2029, dans quatre régions (Tchologo, Poro, Hambol et Gbêkê) et cinq départements (Ferké, Sinématiali, Katiola, Botro et Béoumi). 21 sous-préfectures et 517 villages sont concernés. 40 000 certificats fonciers seront délivrés sur 500 000 hectares et 40 000 contrats fonciers seront signés.
L’AFOR, comme je l’ai déjà indiqué, est en train de conclure un projet avec la Banque Allemande de Développement pour la gratuité du certificat foncier dans les départements de Gagnoa et d’Oumé.
LP : Êtes-vous optimiste dans l’atteinte des objectifs du PNSFR au terme des dix prochaines années ?
Au regard de tout ce qui a été dit, il ressort clairement que le Chef de l’Etat a été clairvoyant en créant l’AFOR, pour adresser la problématique de la sécurisation foncière rurale, avec la coordination du ministère d’Etat, ministère de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières. Vous avez pu le constater, de nombreuses avancées ont été enregistrées. Des défis majeurs ont été relevés, ce qui nous amène à être confiants en l’avenir.
Au demeurant, nous sommes tous conscients que la sécurisation foncière rurale constitue une problématique existentielle pour la Côte d’Ivoire, tant elle conditionne la sauvegarde de la paix et de la cohésion sociale ; en un mot, une problématique de salut public.
L’une des priorités pour le gouvernement pour atteindre la massification des résultats de délimitation des territoires de villages, de délivrance de certificats fonciers et de contractualisation dans un délai de dix ans, consistera à élever la sécurisation foncière rurale au rang d’opération de souveraineté, garante de la survie du vivre ensemble entre toutes les communautés, grâce à un financement pérenne et une prise en main vigoureuse par toute l’élite politique et administrative de notre pays.
Nous encourageons tous les Ivoiriens à prendre pleinement la place qui est la leur, pour qu’ensemble nous puissions conjuguer nos efforts, pour offrir à notre très chère Côte d’Ivoire, un domaine foncier rural totalement sécurisé et paisible pour tous nos concitoyens.
Par OUATTARA Gaoussou