Interview-Kakou Mathias (Président du PPS) : « Nous avons porté plainte contre Koné Katinan »

Président du Parti pour le progrès et le socialisme (PPS), Kakou Mathias dit avoir déposé une plainte contre Koné Katinan Justin, collaborateur de Laurent Gbagbo pour ses propos tenus il y a quelques jours au Burkina Faso. Dans cette interview, il nous donne les motivations de sa démarche. Et invite le procureur de la République à ouvrir une information judiciaire pour que les Ivoiriens soient situés. 

Interview-Kakou Mathias (Président du PPS) : « Nous avons porté plainte contre Koné Katinan »
« Il doit être entendu pour donner les motivations du discours tenu au Burkina »

Le Patriote : Selon nos informations, le Parti pour le progrès et le socialisme (PPS) dont vous êtes le président aurait déposé une plainte contre Koné Katinan Justin. Qu'en est-il ?

Kakou Mathias : Je confirme effectivement qu’en date du 8 août 2024, nous avons par courrier saisi Monsieur le Procureur de la République pour porter plainte contre Monsieur Koné Katinan Justin.


LP : Que lui reprochez-vous ?
KM : Comme mentionné dans notre courrier, nous souhaitons que ce haut cadre du PPA-CI, le parti de Laurent Gbagbo, soit poursuivi pour atteinte à la sureté de l’Etat, en intelligence avec des ennemis à l’extérieur, afin déstabiliser notre pays, de faire l’apologie des coups d’Etat, pour son soutien aux putschistes de l’AES.  Je voudrais rappeler que notre pays est en froid avec certains pays voisins que nous aimons pourtant très bien.  Un patriote ne peut pas en ce moment, sous le prétexte d’une quelconque invitation, aller dans l’un de ces pays pour lui apporter son soutien ferme. Ce qu’il vient de faire était inimaginable au moment où Laurent Gbagbo était au pouvoir.  Pour preuve, en 2006, le lieutenant-colonel Jules Yao Yao a eu le malheur  d’aller à un dîner à la résidence de l’ambassadeur de France en Côte d’Ivoire. À sa sortie de ce diner, les Ivoiriens se souviennent que l’officier supérieur qu’il était avait été bastonné par des ‘’lacrous’’ (soldats de première classe). Tout le monde a condamné l’acte de Katinan. Nous, nous prenons l’initiative d’aller loin en portant plainte. Sinon que de nombreux Ivoiriens réclament cette action en justice.


LP : Votre plainte a-t-elle été jugée recevable ? 
KM : Nous, nous sommes un parti politique. Je suis  aussi citoyen. Quand mon pays est en danger, quand je vois que des gens posent des actes qui peuvent compromettre la paix et le développement… j’agis. Je ne suis pas magistrat. Au nom de mon parti, j’ai porté plainte. Il appartient aux magistrats de juger de la recevabilité ou non de ma plainte. En attendant, quelle que soit la suite qui sera donnée à cette affaire, j’aurais fait ma part. J’ai joué mon rôle de citoyen qui ne veut pas la guerre. Je ne veux pas de troubles. Je ne veux pas d’alliances stratégiques pour nous déstabiliser.


LP : Vous jugez l’acte de Katinan de très dangereux pour qu’il doit être entendu ? 
KM : Il doit être entendu. Il doit expliquer au peuple de Côte d’Ivoire sa démarche. Il faut qu’une information judicaire soit ouverte à cet effet pour savoir réellement le contenu de ce discours à l’extérieur.  Ce qu’il a fait, je le répète, était inimaginable de 2000 à 2010. Si quelqu’un s’hasardait à le faire, c’était l’exil ou la prison. Au nom de la paix, au nom de la réconciliation, on tolère trop de dérives. Je suis un parti socialiste. Je connais les méthodes de la gauche. Je sais lire entre les lignes. J’ai porté plainte au nom du patriotisme républicain. L’acte que ce proche collaborateur de Laurent Gbagbo a posé est très dangereux.  Pour que les gens puissent comprendre la dangerosité de son acte, je veux vous présenter un petit schéma : « Ton pays est en guerre avec un pays voisin. Et tu es la bienvenue dans ce pays. On te déroule, à la limite, le tapis rouge. Ça sous-entend quoi ? ». Nous avons agi parce que nous sommes étonnés etsurpris.  Souvenons-nous des accusations gratuites, les dénigrements, les calomnies du Burkina contre notre pays, contre notre président de la République. On ne peut pas l’accepter. J’agis parce que je veux protéger mon peuple. Peut-être quand le moment va venir, eux ils auront leur billet d’avion pour quitter le pays. Ce qui n’est pas le cas pour  nous autres.  

LP : Au-delà du séjour de Katinan au Burkina, l’actualité politique nationale est marquée par l’appel à Bonoua de Laurent Gbagbo à la gauche ivoirienne. Que pensez-vous de cet appel ?
KM : Je voudrais dire à qui veut l’entendre que Laurent Gbagbo n’est pas de la gauche. Quand on veut respecter les principes qui fondent la gauche, on est respectueux des droits de l’Homme. Souvenons que quand il était au pouvoir, le Parti socialiste français de François Hollande l’avait qualifié « d’infréquentable ».  Il faut que les Ivoiriens se souviennent des graves violations des droits de l’Homme qui ont été dénombrées sous sa gouvernance, les exécutions extra-judiciaires, les enlèvements…  Son appel, c’est juste pour dire : « J’existe, venez me soutenir ». Dans le fond, ils font tout cela pour provoquer des troubles. Comment quelqu’un qui n’a pas son nom sur la liste électorale peut appeler à être soutenu, s’il n’est pas animé par d’autres intensions ? 

" L’opposition ivoirienne est fébrile face à la machine RHDP "

LP : Onze partis politiques et des associations de la société civile demandent la réforme du processus électoral. Qu’en pensez-vous ?
KM : Sur la CEI, je voudrais que les Ivoiriens se souviennent d’où nous venons. Je rappelle que j’ai fait le front républicain. A l’époque, nous militions pour le vote à 18 ans et une CEI indépendante. En 1998, en plein mouvement, nous avons été lâchés par Laurent Gbagbo.  À l’époque, Bédié disait qu’il n’y aurait pas de réforme parce qu’il était en accord avec Gbagbo et le FPI  qu’il avait présenté comme le plus sérieux parti politique en Côte d’Ivoire. À partir de ce moment, Gbagbo avait renoncé au vote à 18 ans et à l’indépendance de la CEI. Cela a été la cause de la rupture entre le PPS et le FPI. Bamba Moriféré avait décidé de se désolidariser du FPI. Ils ne sont pas bien placés pour parler de commission électorale indépendante.  Parce que ce n’est pas leur œuvre. Je sais et je reconnais, qu’ils en parlaient en 1990. Mais à partir de 1998, ils ont lâché ce combat pour autre chose. Après son deal avec Bédié à l’époque, Gbagbo avait changé. Cette précision faite, je voudrais rappeler que c’est cette même CEI qui a organisé les dernières élections  législatives, régionales, municipales, sénatoriales. Et qui a proclamé la victoire du PPA-CI à Yopougon. L’opposition ivoirienne est fébrile face à la machine RHDP. Incapables de lui tenir tête, ils veulent boycotter la présidentielle pour semer la chienlit. Les Ivoiriens ont compris leur jeu. Ils ne vont pas tomber dans leur piège. Ils  veulent capter la sociologie majoritaire pour dire que le candidat du RHDP n’a pas gagné, alors il faut s’opposer et appeler à des négociations pour espérer obtenir au bout du compte un gouvernement d’union nationale. C’est tout ce qu’ils veulent. Celui qui n’a pas son nom sur la liste électorale doit négocier et non faire des mouvements. Ouraga Obou, professeur de droit constitutionnel, nous disait souvent : « Devant  la politique, le droit fui par la fenêtre ». Celui qui a la clé de la solution, c’est le Président Ouattara. Il faut le respecter pour espérer avoir gain de cause. 


LP : Le 7 août dernier, les Ivoiriens ont eu droit à un défilé militaire que certains ont qualifié de folkloriques. Votre réaction ? 
KM : C’est de la pure jalousie. Je ne ferai pas d’autres commentaires. Sinon les Ivoiriens ont vu. Ils ont apprécié. Ils sont fiers de l’armée. J’en profite pour féliciter le Président de la République, le ministre de la Défense, celui de la sécurité, les forces de défenses et de sécurité qui ont tout mis en œuvre pour que les Ivoiriens soient fiers de leur armée.


Réalisée par Thiery Latt