Présidentielle 2025-Mamadou Touré sur TV5 Monde : « La Côte d’Ivoire est sur des fondamentaux solides »

Porte-parole adjoint du RHDP et du gouvernement, le ministre Mamadou Touré a répondu, le lundi 20 octobre, aux questions de la chaîne TV5 Monde, liées à la présidentielle et au climat socio-politique en Côte d’Ivoire. 

Présidentielle 2025-Mamadou Touré sur TV5 Monde : « La Côte d’Ivoire est sur des fondamentaux solides »

Question : Interdiction de rassemblement pour deux mois, une cinquantaine de manifestants qui écopent de trois ans de prison ferme, trois morts en une semaine… Ce n’est pas rien. Ne craignez-vous pas que le spectre des violences passées plane à nouveau sur le pays ?

Mamadou Touré : Non, la Côte d’Ivoire est sur des fondamentaux solides, madame. Nous avons un pays qui s’est modernisé avec une armée et une police professionnelles. Nous sommes dans un processus électoral : les élections auront lieu samedi prochain.

Manifestement, il y a deux blocs : le bloc républicain, composé de partis au pouvoir comme de l’opposition, qui ont décidé d’aller aux élections et de faire confiance aux voix des Ivoiriens ; et le bloc subversif, qui a choisi de défier la démocratie et d’empêcher la tenue des élections.

Pour le bloc républicain – opposition comme pouvoir –, les manifestations dans le cadre du processus électoral sont permises. Mais pour ceux qui veulent obstruer le processus et se livrent à des casses et à des violences, la force reste à la loi.

 

Q : Donc, pour vous, ces morts, c’est normal finalement ?

MT : Mais madame, je n’ai jamais dit cela ! Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. La responsabilité des morts incombe à ceux qui décident d’aller contre la loi et les institutions, et qui choisissent la violence. Nous avons aujourd’hui un gendarme qui s’est fait tirer dessus. La responsabilité revient donc à ceux qui utilisent la voie de la violence. Et ceux-là répondront devant la loi.

 

Q : Vous affirmez que l’alternance ne se décrète pas, elle se gagne dans les urnes. Mais quand des figures comme Laurent Gbagbo ou Tidjane Thiam sont exclues, est-ce vraiment un choix libre pour les électeurs ?

MT : D’abord, il faut sortir du débat des personnes. On le dit, on le répète, il faut sortir de ce débat. Au Sénégal, M. Sonko avait été empêché de se présenter aux élections, mais M. Diomaye est devenu président de la République. Le PASTEF a choisi d’aller aux élections et de faire confiance au processus électoral.

En Côte d’Ivoire, M. Laurent Gbagbo et M. Tidjane Thiam n’ont pas été « exclus » : ils ne remplissaient simplement pas les conditions légales. Comme en France, demain, si Mme Marine Le Pen est condamnée, elle ne pourra pas se présenter. Donc, ne nous demandez pas de faire ce que vous n’acceptez pas chez vous.

Même si nous sommes un pays africain, il y a des lois, et chacun doit s’y conformer.

 

Q : Quand Tidjane Thiam, depuis Paris, dit : « Nous allons libérer la Côte d’Ivoire en sept jours », qu’est-ce que cela vous évoque ?

MT : Rien du tout. Ce monsieur est hors course. Ce qui est important pour nous, c’est le bilan de ces quinze dernières années. Nous avons des responsabilités envers les Ivoiriens, qui nous ont fait confiance. Ce que nous avons pu faire pour eux est clair.

Les défis des cinq prochaines années sont connus : la poursuite des transformations structurelles de notre économie, le maintien d’un taux de croissance élevé, la réduction de la pauvreté. Cinq millions d’Ivoiriens sont sortis de la pauvreté ces dernières années. Nous étions à 55 % de pauvres, nous sommes aujourd’hui à 37 %. Notre objectif est d’atteindre 20 % d’ici 2030. C’est cela notre priorité. Le reste, madame, ne nous intéresse pas.

 

Q : Mais ce que dit Tidjane Thiam, en toile de fond, c’est que ce quatrième mandat du président Ouattara reste très contesté. Les critiques sont claires : ce mandat, comme en 2020 d’ailleurs, violerait l’esprit de la Constitution.

MT : Ce débat est derrière nous. Le Conseil constitutionnel a validé la candidature du président Ouattara. Les Ivoiriens auront donc le dernier mot dans les urnes : ils diront s’ils souhaitent qu’il continue ou non.

 

Q : Vous parliez des populations tout à l’heure. Pourtant, les électeurs semblent bouder le retrait de leurs cartes : beaucoup n’ont pas encore été retirées. Ne sentez-vous pas un désintérêt croissant vis-à-vis du jeu démocratique ?

MT : Je ne sais pas sur quoi vous vous basez pour affirmer cela. Revoyez les processus électoraux précédents : les taux de retrait sont similaires.

 

Q : Alors pourquoi prolonger la période de retrait ?

MT : La CEI a décidé, avec l’accord de toutes les parties, de prolonger de deux jours le retrait des cartes d’électeur. Et même si certains Ivoiriens n’arrivaient pas à retirer leurs cartes avant le scrutin, la loi leur permet de le faire le jour du vote. Cela n’a donc aucun impact sur la participation.

 

Q : Quinze ans après l’arrivée d’Alassane Ouattara, la Côte d’Ivoire affiche effectivement une forte croissance, plus de 6 %. Mais les inégalités restent criantes. Comment expliquez-vous ce décalage entre succès macroéconomique et difficultés sociales ?

MT : Vous êtes sévère, madame. Même aux États-Unis, en France, partout, il y a des inégalités sociales. Il faut regarder d’où nous venons. En 2011, nous avions 55 % de pauvres en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, nous sommes à 37 %. Plus de cinq millions d’Ivoiriens sont sortis de la pauvreté.

Avec l’appui de nos partenaires, 400 000 ménages vulnérables sont assistés chaque trimestre. Près de quatre millions de personnes ont été raccordées à l’électricité, et la couverture est passée de 33 % à plus de 95 %. En quinze ans, 608 collèges ont été construits, contre 294 en cinquante ans. Le nombre d’universités est passé de trois à neuf. Les inégalités existent, certes, mais elles reculent. Et c’est ce qui est important. Cette dynamique va se poursuivre : notre bataille, c’est de réduire ces écarts pour que tous les Ivoiriens vivent heureux et dans l’égalité.

 

Q : Mamadou Touré, les habitants de Yamoussoukro réclament du concret, des retombées économiques. Est-ce que le RHDP, héritier du parti d’Houphouët-Boigny, a encore pour ambition de faire de Yamoussoukro une véritable capitale économique ?

MT : La réponse se trouve dans la seconde partie du reportage que vous venez de diffuser : une zone industrielle, le transfert du Sénat et du siège des chefs traditionnels à Yamoussoukro, cinq kilomètres de bitume, un train rapide qui reliera Abidjan à Yamoussoukro en 20 à 30 minutes…

Ce sont autant de projets qui permettront à Yamoussoukro d’assumer son rôle de capitale. Je rappelle que Yamoussoukro est la ville natale du président Houphouët-Boigny, mais avant le Président Ouattara, plusieurs présidents se sont succédé sans rien y faire de concret. La renaissance de Yamoussoukro, c’est Alassane Ouattara, et cela va se poursuivre durant les cinq prochaines années.