Damana Pickass derrière les barreaux : Voici ce qu’il risque
Fin de cavale pour le vice-président du PPA–CI, Damana Pickass. L’opposant a été interpellé, le mardi 4 novembre, à Bingerville, après plus de trois semaines passées dans la clandestinité. Le 15 octobre dernier, ce responsable politique, membre du parti de Laurent Gbagbo, avait lancé un appel public aux Ivoiriens— et particulièrement aux militants du Front commun — les exhortant à descendre dans la rue, malgré l’interdiction de toute manifestation sur la voie publique pour une durée de deux mois, décidée par le gouvernement.
« En ma qualité de coordonnateur du comité opérationnel du Front commun, j’ai décidé de prendre mes responsabilités et de poursuivre le combat, advienne que pourra ! », avait-il déclaré dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Soutenant que la marche est un droit constitutionnel, il ajoutait :« Jeunes, femmes, adultes, travailleurs, étudiants, démocrates de tous horizons, vous êtes invités à occuper pacifiquement les rues. Que ce soit dans tout le district d’Abidjan et dans les grandes villes de l’intérieur du pays, tous les Ivoiriens doivent se mobiliser de façon pacifique. Je voudrais rassurer ceux qui ont encore des doutes : jamais, aujourd’hui plus qu’hier, nous ne sommes aussi proches de la victoire et de la délivrance. Mais la balle est dans votre camp. Le salut du pays réside entre nos mains. Osez agir, osez manifester pour oser gagner et triompher ! »
Ces appels à la mobilisation lui ont valu une traque de plusieurs semaines, avant que les forces de sécurité ne le localisent et ne l’interpellent dans sa cachette à Bingerville. Son arrestation a été confirmée par un communiqué du procureur de la République. Selon ce document officiel, Damana Pickass est poursuivi pour “appels à l’insurrection populaire” et “tentative de renversement des institutions de la République”. Le communiqué précise que : « Ces appels, ainsi que ceux d'autres acteurs, ont conduit à la constitution d'attroupements armés et non armés. Ces attroupements ont occasionné, en divers endroits du territoire national, des actes de violence portant atteinte à la sécurité nationale, des assassinats, des vols à main armée, des extorsions de fonds, des destructions et incendies de biens publics et privés, ainsi que des atteintes graves à l’intégrité des personnes et des empêchements de vote. »
Les faits reprochés à l’opposant sont réprimés par l’article 176 du Code pénal ivoirien, issu de la loi n°2019-574 du 26 juin 2019, qui dispose : « constitue un mouvement insurrectionnel toute violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire national. » Ce même article prévoit que quiconque participe à un mouvement insurrectionnel encourt une peine d’emprisonnement de 5 à 20 ans. L’affaire n’est pas sans rappeler celle de 2020, lorsque des poursuites similaires avaient été engagées contre Pascal Affi N’Guessan, alors président du FPI, arrêté le 6 novembre 2020 pour sa participation à la proclamation d’un “Conseil national de transition”, censé remplacer le régime en place. Lui et plusieurs autres responsables de l’opposition avaient été inculpés pour “complot contre l’autorité de l’État”, “mouvement insurrectionnel”, “assassinat” et “actes de terrorisme”, à la suite des violences postélectorales qui avaient fait 85 morts et plus de 500 blessés entre août et novembre 2020.
Rahoul Sainfort
