Regagner la confiance des Ivoiriens
"L'élection sera apaisée, transparente et démocratique". C'est le gage fort que le chef de l'Etat, Alassane Ouattara, donne depuis le début de l'année quant à la tenue du scrutin présidentiel d'octobre prochain. Après son message à la Nation, le 31 décembre 2024, il a réitéré cet engagement devant le corps diplomatique accrédité en Côte d'Ivoire, la semaine dernière, lors de la traditionnelle cérémonie de présentation des vœux du nouvel an.
Derrière cette forme d'insistance se cache, tout l'enjeu de cette élection qui est déjà dans tous les esprits en Côte d'Ivoire. À la fois des politiques qui mijotent leurs plans pour cette bataille politique et des citoyens ordinaires qui ne souhaitent pas que cette échéance vienne perturber la paix chèrement retrouvée depuis 2011 et, par ricochet, leur quiétude.
Le vrai vainqueur de cette élection à venir devrait être la paix, comme le souhaitent les guides religieux musulmans et chrétiens. À juste raison d'ailleurs. Le pays, il faut le dire, revient de loin. Après le spectacle écœurant offert à la communauté internationale par le camp de Laurent Gbagbo, perdant de la présidentielle de 2010 et les espoirs déçus de 2020 où la Côte d’Ivoire a flirté avec un début de guerre civile fomentée par Henri Konan Bédié, le peuple ivoirien caresse le secret espoir que les démons de la violence se sont vraiment éloignés.
Et cela, le Président Ouattara l'a bien compris, lui qui s'échine, au prix de mille et un sacrifices, à reconstruire du nord au sud et de l’est à l’ouest ce pays. D'où sa détermination à œuvrer pour des élections sans violences dans des conditions d’équité et de transparence. Mais, il faut le dire tout net, la préservation de la paix et la stabilité ne doit uniquement pas être le combat d'un seul homme, fut-il le Président de la République. C'est plutôt l'affaire de tous les Ivoiriens, à commencer par la classe politique dans son ensemble, toutes obédiences confondues. En tant qu'acteurs clé de ce jeu électoral, il est clair que les hommes et femmes politiques ont une grande responsabilité dans la quête d'une élection apaisée.
Ce que les Ivoiriens attendent d'eux, ce ne sont pas des discours enflammés, comme c'est déjà, hélas, le cas, qui réchauffent l'atmosphère et créent la psychose chez les populations. Mais, des projets et des idées concrètes pour améliorer leurs conditions d'existence, tout en portant plus haut le pays sur les cimaises du développement. Ce qu'on ne veut pas, c'est de créer une crise artificielle autour d’individus emmêlés dans leurs propres turpitudes, comme si la Côte d'Ivoire était la propriété d'un seul individu ou encore de s'évertuer à discréditer le processus électoral et la commission qui le pilote.
Après tout ce que le pays a traversé et une remontée exceptionnelle de la pente grâce au leadership et à la vision du Président Alassane Ouattara, il faut rendre à César ce qui est à César, la Côte d'Ivoire ne peut plus se nourrir de discours creux et foncièrement propagandistes. Celui qui aspire à diriger ce pays doit convaincre les Ivoiriens avec un projet de société et un programme de gouvernement concrets, bien précis et chiffrés. Il s'agira, pour lui, de montrer sa capacité à mieux faire que ce qui a été déjà fait !
C'est indéniablement sur ce terrain que les électeurs attendent les potentiels candidats qui n'ont absolument pas le droit de dévier de cette trajectoire. Car, la Côte d'Ivoire a aujourd'hui atteint un tel niveau de rayonnement diplomatique et de développement socioéconomique, qu'elle ne peut plus se permettre un retour en arrière. D'ailleurs, les Ivoiriens, qui aspirent à la paix et désirent profondément au développement, n'accepteront pas cela. C'est pourquoi, les acteurs politiques ont le devoir d'opter pour une saine compétition avec un esprit véritablement démocratique. À savoir que les vaincus acceptent leur défaite et félicitent, tout simplement, le vainqueur. Ni plus, ni moins. Comme nous l’ont montré les hommes politiques sénégalais et ghanéens récemment. Pourtant, dans ces deux pays d’Afrique de l’Ouest, si proches de nous, les acteurs politiques ont rarement fait consensus sur l’organisation des élections. Malgré les divergences de vue, la confiance dans les institutions a fini par primer et l’Etat de droit, à s’imposer à tous.
Ne pas s'engager dans cette voie, c'est faire courir au pays le risque d'une nouvelle déflagration qui aurait des conséquences désastreuses. Car, avec les nombreux foyers de tension dans le monde, il n'est pas du tout sûr que la communauté internationale court, à nouveau, au chevet de la Côte d'Ivoire qui ne saurait pas ce qu’elle veut. Et cela ne ferait que désespérer davantage les Ivoiriens qui, échaudés par les crises précédentes, se détournent de plus en plus de la politique. Comme en témoigne leur grand désintérêt pour la révision de la liste électorale. C'est toute la problématique de cette élection présidentielle qui cristallise déjà l'attention des uns et des autres. Préserver, au-delà des divergences d’opinion politique, l’essentiel : la paix et la stabilité. Sans aucun doute, le vrai combat à mener en 2025.
Charles SANGA