Vital Kamerhe Lwa Kanyiginyi : « Ce qui se passe en Côte d’Ivoire est un miracle »

Vital Kamerhe Lwa Kanyiginyi : « Ce qui se passe en Côte d’Ivoire est un miracle »

Je prends la parole ce jour, devant vous, mes frères de la Côte d’Ivoire, dans ce lieu mythique et sur cette terre riche d’histoire et de souvenir.  Souvenir des affres de la guerre et du démon de la division qui, un temps, a ébranlé la quiétude de ce merveilleux pays. Mais, que par la volonté, la détermination et le patriotisme des forces politiques et les forces vives de votre nation ont si définitivement conjuré. En effet, il y a encore 10 ans, l’Afrique étant comparable à un corps humain, à Kinshasa et de partout au Congo, nous suivions impuissants, la mort dans l’âme, les bombardements des populations ivoiriennes innocentes, certainement à cause de divergence politique. Aujourd’hui, comment ne pas saluer chaleureusement toutes les transformations qualitatives observées dans tous les secteurs de la vie nationale dans ce beau pays qui a résolument tourné le dos à la haine ethnique et à la crise identitaire.

Mon vœu  le plus cher est que plus jamais l’Ivoirien ne déteste l’Ivoirien. Plus jamais l’Africain ne déteste l’Africain. Et que dans l’unité et l’amour, les Ivoiriens maintiennent cet élan. Et que les autres Africains leur emboitent le pas pour une Afrique qui se lève et qui recouvre sa dignité à cette ère de mondialisation. Ceci n’a été possible que grâce à un grand sursaut patriotique de l’élite ivoirienne, des hommes et des femmes de Côte d’Ivoire sous le leadership visionnaire et éclairé de Son Excellence, Alassane Ouattara. L’amour et la flexibilité des grands hommes, notamment, l’ex-président Henri Konan Bédié d’heureuse mémoire. Comment ne pas saluer cette poignée de main historique de vivre ensemble entre le Président de la République, ADO et l’ex-président Laurent Gbagbo que je salue en passant. Seuls, les grands hommes sont capables d’un tel dépassement.

 

Honorable président de l’Assemblée nationale

Chers collègues,

Honorables députés 

Vénérables sénateurs,

Mesdames et messieurs

 

Cette palme d’or revient aussi à la jeunesse ivoirienne qui s’est mobilisée pour plaider à travers l’Afrique et le monde la réconciliation nationale et la cause de ce beau pays. Certes, il y a encore du chemin à parcourir, mais ce développement s’observe, notamment dans le secteur des infrastructures de base, telles que les routes, les rails, les écoles, les hôpitaux, les centres de santé, l’accès à l’électricité et à l’eau potable, l’amélioration de l’habitat, à la modernisation des milieux ruraux, à la base de la relance de l’agriculture et du désengorgement de la ville d’Abidjan, la capitale économique, ma belle Abidjan comme l’avait si bien chanté en son temps  Seigneur Tabouly Rochereau.

 

Honorable président de l’Assemblée nationale,

Chers collègues députés

Vénérables sénateurs,

Mesdames et messieurs

 

Avant de poursuivre mon propos, je voudrais encore une fois saluer l’amour que les jeunes et l’élite de la Côte d’Ivoire ont manifesté envers leur pays. Nous avons vu le pays de Didier Drogba, de Yaya Touré, les Magic  System… Partout où ils sont passés, ils ne parlaient que de la réconciliation dans leur pays. Ça doit nous inspirer, nous les Congolais.   

En ce moment singulier, mon pays fait encore face à une guerre injuste. Qui impose aux innocentes populations du Nord Kivu, de Litouri et du Sud Kivu, dans la partie est de la République démocratique du Congo à des atrocités d’une barbarie innommable mettant entre parenthèse toute expression d’humanité au profit d’intérêts obscures de ceux qui ont délibérément choisi de s’ériger contre la paix, contre l’humanisme, contre le progrès et contre l’impératif de solidarité et de fraternité africaine précieux héritage que nous ont légué les pères des indépendances chèrement acquises. Ce drame que je viens de décrire ne peut laisser aucun Africain indifférent. Depuis trois décennies maintenant, c’est dans le sang et les pleurs qu’à l’est du Congo les enfants sont arrachés à leurs mères et les époux à leur femme. Dans cette partie du pays, les vieux  sont souvent jetés sur les routes   livrés à l’errance et luttent tous les jours pour se soustraire aux voiles brumeux et la violence qui tente d’obscurcir l’horizon vers des perspectives individuelles et collectives. C’est depuis trois décennies que dans nos pays en effet, que des bruits de botte et les coups de canons charrient  les rivières de sang et de torrent   des larmes sur nos terres de l’est pourtant si riches, si belles. Trois longues décennies que les élèves y sont empêchés d’étudier correctement, que les mères et les filles sont éprouvées dans leur dignité par les viols systématiques érigés en armes de guerre. Que de sang saccagé. Que du bétail décimé. Que de maisons incendiées. Que de familles endeuillées dans l’indifférence générale et parfois dans un silence coupable du monde.

Je profite alors de cette tribune pour joindre ma voix à celle du peuple congolais, de son Président  Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo pour non seulement dénoncer ce drame, mais aussi pour en appeler à la solidarité africaine en vue de faire triompher l’idéal  de la paix et de la prospérité partagée. Cette aspiration à la paix et à la sécurité est aussi la vôtre. Je sais qu’au niveau le plus élevés de l’agenda politique  ivoirien qui s’illustre, notamment par l’implication de son Président de la République, de son gouvernement, pour la recherche de solution pacifique aux guerres auxquelles certaines parties de l’Afrique font face.

 

Honorable président de l’Assemblée nationale,

Chers collègues députés,

Vénérables sénateurs,

Mesdames et messieurs

 

L’unité et la solidarité africaine que nous appelons de tous nos vœux, c’est aussi notre capacité en tant que leader à trouver des solutions africaines aux problèmes africains. Nous devons par tous les moyens mettre fin à la guerre dans mon pays, la République démocratique du Congo, au Sud Soudan, au Mali, au Burkina-Faso pour que l’Afrique puisse se doter d’un plan concerté de développement intégral de ce beau continent, la nouvelle destination du monde. C’est pour moi l’occasion de saluer à cet égard les efforts de Leurs Excellences Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire et Monsieur  Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République démocratique du Congo, en faveur de la paix et de l’unité africaine.

Pour terminer ce chapitre, je voudrais inviter tous les Africains à apporter leur soutien au processus de Luanda visant à ramener la  paix en République démocratique du Congo, processus conduit des mains de maitre par Son Excellence João Lourenço, Président d’Angola. Je salue également le soutien apporté par les Etats membres de la CADEC à mon  pays. Dans le même élan, nous devons  encourager   la poursuite du processus de Nairobi conduite par l’ancien président kenyan Uhuru Kenyatta.

 

Honorable président de l’Assemblée nationale,

Chers collègues députés,

Vénérables sénateurs,

Mesdames et messieurs

 

Je voudrais cependant vous rassurer chers frères et sœurs de Côte d’Ivoire qu’en dépit des difficultés, le peuple congolais s’est montré brave et résilient, fidèle à la ligne tracée par Patrice Lumumba, notre héros national, celle de la grandeur et de la dignité. Dans nos villages et dans nos campagnes, nous n’avons pas baissé les bras de sorte qu’aujourd’hui, nous sommes résolument inscrits sur les sentiers de la consolidation de l’Etat, du renforcement de la gouvernance, ainsi que celui du progrès économique et social. En dépit des écueils sécuritaires, la RDC reste unie, dynamique et attrayante pour les investissements étrangers comme nationaux dont le volume augmente à l’image de la croissance économique que connait le pays (...)

L’Afrique doit aimer l’Afrique.

J’étais en Côte d’Ivoire, il y a quelques mois, à l’Hôtel Ivoire.   Mais je reviens, le même chemin qui m’avais amené à l’aéroport, je ne l’ai plus reconnu.

Je dis, mais qu’est-ce qui se passe ? On me dit qu’on est en train de construire 100 km de rails. Nous voyons les reboisements. Nous voyons l’éclairage la nuit. On a envie, à la fois de pleurer de joie pour les Ivoiriens, mais de pleurer de peine pour les Congolais. Ça fait mal au cœur. Tout est question de volonté. La volonté ne manque pas. Notre pays est en guerre depuis 30 ans.

Je voudrais terminer mon propos en saluant une fois de plus le miracle ivoirien. C’est un miracle. Ce miracle n’a été possible que grâce à vous tous, de l’opposition comme de la majorité, de la société civile, des jeunes, de toutes les populations parsemées à travers votre beau pays derrière un leadership éclairé et  visionnaire du Président Alassane Ouattara. N’ayons pas peur de copier ce qui marche. Nous viendrons nous inspirer ici…

Propos recueillis par TL