Interview-Maïzan Koffi Noël (Cadre du RHDP) : « Notre plan A est Alassane Ouattara, le plan B à Z ne dépend que de lui »

Actualité politique nationale, enjeux du processus électoral, remobilisation des bases militantes… Maïzan Koffi Noël, député de Bondoukou commune et sous-préfecture, et secrétaire départemental RHDP Bondoukou Ouest, a partagé ses perspectives lors de l’émission « A voix haute » du média digital « Politiques ».

Interview-Maïzan Koffi Noël (Cadre du RHDP) : « Notre plan A est Alassane Ouattara, le plan B à Z ne dépend que de lui »
La position de l'opposition est compréhensible, c'est son rôle de s'opposer et de revendiquer des changements législatifs ou réglementaires si elle le juge nécessaire

Question : Comment analysez-vous la situation politique actuelle en Côte d’Ivoire ?

Maïzan Koffi Noël : La situation politique actuelle en Côte d'Ivoire est caractéristique des périodes précédant une élection présidentielle. Cette dynamique, que nous avons observée dans d'autres pays comme le Sénégal, est inhérente au jeu politique. La présidentielle étant l'élection majeure, chaque parti se mobilise pour la victoire. Le RHDP entend poursuivre son action afin de consolider le bilan déjà positif du président de la République, ce qui témoigne de la vitalité de notre démocratie. Je me réjouis de l'évolution de notre action politique.

 

Question : Peut-on toujours parler de démocratie alors que des figures politiques telles que Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé et Tidjane Thiam ont été radiées de la liste électorale ?

Maïzan Koffi Noël : Il est important d'examiner chaque cas individuellement. Guillaume Soro a fait l'objet de procédures judiciaires qui ont abouti à des décisions de justice. La loi stipule clairement qu'une implication dans une action judiciaire entraîne la perte du droit de participation aux élections. Cette disposition s'applique également aux cas de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Leur absence de la liste électorale résulte de décisions de justice que je ne commenterai pas, n'étant pas juriste. Concernant Tidjane Thiam, l'article 48 du code électoral est explicite : une personne ayant volontairement acquis une autre nationalité ne peut être candidate à une élection sans renoncer à cette nationalité. M. Thiam s'est inscrit sur la liste électorale en 2022 et n'a renoncé à sa nationalité française qu'en 2025, le rendant inéligible selon la loi. Le débat autour de sa candidature me semble déplacé, car certains tentent de l'orienter vers des considérations identitaires. Il ne s'agit pas d'une question de nationalité, mais d'éligibilité. Nous ne contestons pas l'ivoirité de M. Thiam, mais, au regard des faits, il ne remplit pas les conditions pour être candidat.

 

Question : L’opposition y voit une manœuvre du pouvoir pour écarter des adversaires importants…

Maïzan Koffi Noël : Non, il ne s'agit pas d'une manœuvre. L'article 48 du code électoral est clair. Le PDCI n'a pas anticipé ce risque en mettant en place une gestion adéquate. Lorsqu'on a des ambitions politiques, une analyse des risques s'impose. L'article 48 aurait dû être identifié comme un obstacle potentiel. Si la procédure de renonciation à la nationalité française avait été initiée plus tôt, M. Thiam ne se trouverait pas dans cette situation. Il est donc responsable de sa propre situation. Sa nationalité ivoirienne n'est pas en cause, mais la question de l'éligibilité demeure le véritable débat.

 

Question : L’opposition insiste sur la nécessité d’une reprise du dialogue politique.

Maïzan Koffi Noël : De nombreuses rencontres ont lieu dans le cadre du dialogue politique, et il ne revient pas à l'opposition d'en déterminer la fréquence. Plusieurs courriers ont été adressés au Premier ministre à cet effet. L'opportunité et la pertinence d'un tel dialogue seront évaluées par le Président de la République ou le Premier ministre. Si la situation politique le nécessite, un dialogue sera organisé en temps voulu. C'est une pratique courante du parti au pouvoir. L'opposition ne saurait prétendre qu'il n'y a jamais eu de dialogue politique dans ce pays. Face aux tensions, les autorités sont toujours intervenues pour faciliter des compromis. La position de l'opposition est compréhensible, c'est son rôle de s'opposer et de revendiquer des changements législatifs ou réglementaires si elle le juge nécessaire.

 

Question : Quel est votre avis personnel sur cette question du dialogue ?

Maïzan Koffi Noël : Je suis pleinement aligné sur la position et la démarche du gouvernement. S'il estime qu'un dialogue est nécessaire, il aura lieu. Examinons les griefs de l'opposition, notamment concernant la CEI. Historiquement, et jusqu'à récemment, les élections en Côte d'Ivoire étaient organisées par le ministère de l'Intérieur. Suite aux accords de Linas-Marcoussis, un consensus politique a émergé pour la création d'un organe plus neutre. Les partis politiques ont alors identifié un dispositif indépendant comme étant le plus approprié pour organiser les élections. Ce n'est pas parce que l'opposition formule une demande qu'elle doit être systématiquement satisfaite.

 

Question : Pensez-vous que la stabilité politique actuelle est suffisante pour aborder l’élection présidentielle d’octobre 2025 ?

Maïzan Koffi Noël : Oui, tout à fait. Nous sommes dans un pays démocratique, et le débat politique, y compris les échanges avec l'opposition, est essentiel et enrichit notre démocratie. Le gouvernement gère l'action politique, mais la contribution et les critiques des partis politiques sont importantes pour améliorer la gouvernance. Concernant les élections de 2025, la CEI est un point central de discussion. Cependant, la mouture actuelle me semble être la plus aboutie. Dès la création du PPACI, un de ses représentants a intégré le bureau de la CEI en tant que vice-président, et toutes les décisions sont prises de manière collégiale, avec une majorité de représentants des partis politiques. La perfection n'existe pas, et des améliorations sont toujours possibles. Le processus de révision de la liste électorale, initialement prévu en mars, a été reporté à la demande des partis politiques qui se disaient non préparés. L'opération de révision ne se limite pas à la collecte des données ; elle inclut également le traitement, le contentieux et l'affichage, étapes auxquelles tous les partis ont souscrit.

 

Question : La candidature d’Alassane Ouattara, présentée comme naturelle par le RHDP, suscite également des critiques…

Maïzan Koffi Noël : Nous n'allons pas rouvrir ce débat constitutionnel. Chaque Ivoirien a son opinion sur la Constitution, c'est pourquoi la loi prévoit un mécanisme d'arbitrage : le juge constitutionnel. C'est à lui de déterminer si le Président Alassane Ouattara est éligible ou non.

 

Question : Est-ce donc le meilleur candidat pour le RHDP ?

Maïzan Koffi Noël : Il n'y a pas photo.

 

Question : Mais à 83 ans, ne pensez-vous pas que le moment est venu de passer la main ?

Maïzan Koffi Noël : C'est à lui de décider. Notre plan A est Alassane Ouattara.

 

Question : Votre plan B ?

Maïzan Koffi Noël : Le plan B à Z ne dépend que de lui.

 

Question : En tant que secrétaire départemental RHDP Bondoukou ouest, quelle est la place de Bondoukou dans la stratégie de reconquête du pouvoir par le RHDP ?

Maïzan Koffi Noël : Le RHDP est structuré en coordinations régionales, avec un Directoire représentant l'organe central et une direction exécutive assurant la gestion opérationnelle quotidienne. Viennent ensuite les coordinations régionales et les secrétariats départementaux, qui animent la vie du parti au quotidien dans les régions. Le RHDP se porte très bien dans le Gontougo. Un indicateur clé de la vitalité d'un parti est le nombre d'élus. Aux dernières législatives, le RHDP a remporté 10 des 12 sièges de députés, et aux municipales, 5 des 7 postes de maire. Chaque région a des objectifs fixés par le Directoire, et le Gontougo les a atteints. La politique est une science. Lors des derniers enrôlements sur la liste électorale, des objectifs de primo-votants ont été assignés à chaque coordination régionale, qui les a ensuite répartis entre ses secrétariats départementaux. À mon niveau, j'ai fait de même dans les quartiers et villages, en mettant en place des indicateurs pour suivre l'atteinte de ces objectifs. En tant que secrétaire départemental, je suis évalué via une base de données suivie par le Directoire.

 

« À Bondoukou normalement, le RHDP n’a pas besoin de battre campagne »

 

Question : Quel est l’état d’esprit des militants du RHDP sur le terrain ?

Maïzan Koffi Noël : Les militants sont très mobilisés. En tant qu'homme de terrain, je peux affirmer que la politique se conçoit et s'exécute. Nous sommes évalués au niveau départemental. Par exemple, un département avec 12 sections de 250 militants devrait enregistrer 3000 militants enrôlés dans la base de données du parti, qui dispose d'outils de suivi. La véritable politique se déroule sur le terrain, pas sur les réseaux sociaux. Dans ma circonscription, j'ai 12 sections. Lors d'une visite récente à Bondoukou, j'ai rencontré les secrétaires de section pour échanger et les informer des directives du parti. À Bondoukou, nous n'avons normalement pas besoin de faire campagne, compte tenu des actions de développement initiées dans la région. Lorsque je me suis présenté en 2016, seuls 11 villages sur 50 étaient électrifiés. Aujourd'hui, aucun village n'est dans l'obscurité. Ma circonscription compte trois sous-préfectures, qui étaient toutes dépourvues d'eau potable. Désormais, chacune dispose de châteaux d'eau, et un programme de raccordement aux villages est en cours. En 2016, les populations m'ont signalé n'avoir pas vu de reprofilage de leurs routes depuis une trentaine d'années. Aujourd'hui, toutes les routes de Bondoukou sont reprofilées. Avant l'arrivée au pouvoir du Président Alassane Ouattara en 2011, Bondoukou n'avait pas d'université. J'ai fait mes études secondaires à Bondoukou, y arrivant après mon entrée en sixième. Je suis allé à Abidjan après le baccalauréat et en France après ma maîtrise. Aujourd'hui, un jeune de mon village, situé à 15 kilomètres de Bondoukou, peut étudier à l'université de Bondoukou sans avoir à se déplacer à Abidjan, ce qui a permis à de nombreux jeunes sans famille à Abidjan de poursuivre leurs études supérieures. À l'arrivée du Président Ouattara, il n'y avait ni CAFOP ni CHU à Bondoukou. Aujourd'hui, nous avons un CAFOP, un CHU en construction et un lycée de jeunes filles. Ces réalisations concrètes nous donnent la légitimité nécessaire pour aller à la rencontre des populations. Avant 2011, il n'y avait qu'un petit centre de santé dans mon village ; aujourd'hui, il y a un médecin. Notre action politique se base sur la démonstration des réalisations existantes, ce qui nous offre des éléments de comparaison tangibles.

Retranscrite par  Sogona Sidibé