Ma muse : Réseaux … toxiques !
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« Les réseaux sociaux ont donné le droit à la parole à des légions d'imbéciles qui avant ne parlaient qu'au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd'hui ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel ».
Le célèbre universitaire et écrivain italien Umberto Eco ne croyait pas si bien dire, en dénonçant les effets pervers des réseaux sociaux. En tout cas, l’utilisation toxique que des internautes ivoiriens font de ces plateformes numériques lui donne amplement raison. Les contenus éducatifs et enrichissants ? Ils s’en moquent éperdument, ce qui les intéresse de ce sont les « gbairai », entendez les clashs avec des propos désobligeants parfois à la limite de l’indécence ; les révélations salaces sur la vie privée de personnalités ou de célébrités, peu importe qu’elles soient vérifiées ou infondées ; les injures à l’emporte-pièce et, surtout, la manipulation à outrance, avec une flopée de fake news ventilées avec le noir dessein de nuire à autrui.
Ainsi, ils se délectent des affirmations gratuites de pseudo-activistes ou supposés influenceurs qui, en réalité, ne sont que des individus sans foi ni loi, mus cyniquement par la recherche effrénée de « bad buzz » pour générer le maximum de vues. Quitte à salir l’honorabilité d’honnêtes citoyens. Des gens sans scrupules qui ne sont pas mieux que ces délinquants qui agressent dans les rues de certaines communes d’Abidjan, à la tombée de la nuit, des hommes et des femmes rentrant chez eux après une dure journée de labeur. Ils ne sont pas non plus moins criminels que ces bandits de grand chemin qui braquent des domiciles et des commerces. Car, avec le clavier de leurs smartphones, ordinateurs ou tablettes, ils font autant que des armes à feu.
En Côte d’Ivoire - c’est triste de le relever - les réseaux sociaux riment, malheureusement, la plupart du temps, avec mensonge, diffamation et intoxication. Et ils ne sont pas loin d’être, par moment, au regard des excès de certains utilisateurs, une « arme de destruction morale ». D’ailleurs, en cette année électorale, il y a fort à parier que ces outils numériques seront utilisés pour mettre à mal le tissu social et la cohésion sociale. Déjà, ils bruissent des joutes verbales entre les militants des partis politiques, avec en prime des discours haineux et violents. Et ça ne fait que commencer…
C’est vrai, tous les contenus ne sont pas mauvais car des férus du net - plus intelligents et lucides - utilisent à bon escient les réseaux sociaux pour développer leurs business ou vendre des compétences et services. Mais, la masse critique, elle, raffole des ragots, « affairages » et … pitreries dont le seul mérite est d’amuser la galerie ou d’abrutir la société. Et même si les appels au meurtre, à la xénophobie, au racisme sont sévèrement punis par la loi ivoirienne, les dérives continuent au grand dam du bon sens ou de la raison. Hélas…
Y. Sangaré