Sur une col : Paresse douteuse

Je suis tombé hier sur une vidéo d’une interview accordée par le sieur Bredoumi Soumaïla à un média international et j’ai eu beaucoup de peine pour le porte-parole du PDCI. A une question, pourtant simple, du confrère à propos de Tidjane Thiam, l’homme d’ordinaire si volubile quand il s’agit de défendre son patron, a tellement baragouiné la réponse que son interlocuteur a dû se montrer insistant pour espérer lui tirer les vers du nez. Hélas, en vain ! Malgré le torrent de sueur qui lui dégoulinait du visage et le débit tonitruant de son verbe, rien d’à peu près intelligible n’a pu sortir des explications du malheureux mandataire du grand et fameux banquier.
La question était en substance celle-ci : « Tidjane Thiam, qui a une double nationalité ivoirienne et française, va-t-il renoncer à la seconde, puisqu’il est un très probable candidat de son parti (dont il est le président élu) à l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire ? ». Et voilà Bredoumi qui cafouille, qui louvoie, qui bégaie-même. Son regard est fuyant, comme s’il cherchait la rescousse d’une voix enchanteresse qui viendrait lui passer le mot.
Sa seule réponse à peu près audible est la suivante : « au moment où je vous parle, M. Thiam n’a aucun problème d’éligibilité ». Une réponse qui pour le journaliste n’est qu’une périphrase qui esquive la question précise qui lui est posée. Alors, voilà le pauvre confrère qui insiste : « Votre candidat a-t-il ou va-t-il, OUI ou NON, renoncer à la nationalité française ? » Il n’aura jamais la réponse à cette interrogation, Bredoumi s’étant muré dans cette espèce de fuite en avant totalement surréaliste pour l’homme de média.
Alors, la vraie question est donc celle-ci : à quoi joue Tidjane Thiam ? Comment, à 9 mois d’une échéance électorale capitale, à laquelle il est censé prendre part en portant l’étendard d’une importante formation politique comme le PDCI, considéré comme la première force de l’opposition, un leader d’un parti ne s’empresse pas de régler ce qui pourrait être un obstacle certain à sa participation à ce scrutin ?
Pourquoi traine-t-il si mollement les pas ? Pourquoi cette question n’a-t-elle pas fait partie de ses priorités dès lors qu’il est rentré au pays, s’est fait élire président du parti en s’engageant devant les militants à le conduire au palais présidentiel ? Que cache donc cette paresse de mouvements vers les tribunaux français pour vider ce « petit contentieux » ?
Car, aujourd’hui, il y a peut-être un problème que ce manque d’entrain soulève dans l’esprit des Ivoiriens. C’est celui lié à la morale et à l’éthique dont on peut aisément dire qu’elles font cruellement défaut à notre potentiel « futur président de la République ».
Comment afficher tant d’ardeur à conduire le destin d’un pays quand on se montre si nonchalant à s’en réclamer citoyen à part entière ? « Tu es pressé de diriger la Côte d’Ivoire mais tu n’es pas chaud à devenir Ivoirien chap-chap », s’étonnerait-on à Abobo.
KORE EMMANUEL