Les vérités crues de Kuibiert-Ibrahime Coulibaly aux partis politiques 

Les vérités crues de Kuibiert-Ibrahime Coulibaly aux partis politiques 

« Nous ne sommes pas des adversaires des partis politiques. Parce qu'il y a un principe qui est connu en politique : on ne fait pas de passe à son adversaire. Si nous étions des adversaires, bon nombre de citoyens, candidats de l'opposition, ne seraient jamais devenus députés, ne seraient jamais devenus sénateurs, ne seraient jamais devenus des conseillers régionaux.

Et, par exemple, à l'élection des députés de 2021, 91 sièges sont revenus à l'opposition et 25 sont revenus aux indépendants. 76 sièges sont revenus à ceux qui n'ont aucune présence quelque part.

Alors, si nous étions inféodés ou si nous étions des adversaires, comment feraient-ils pour être députés ? Parce que le principe est qu'on ne fait pas en politique la passe à son adversaire. Pour être plus concret, pour l'élection des députés en 2021, à Port-Bouet, le PDCI-RDA était opposé au RHDP.  Le PDCI-RDA a remporté la victoire.

Si nous étions inféodés au pouvoir et que nous étions des adversaires, il n'aurait pas remporté cette victoire. Ensuite, à Tankessé où il y avait Monsieur Soumaïla Bredoumy Traoré, le PDCI-RDA était opposé au RHDP porté par Monsieur Haidara Soualiho. Monsieur Bredoumy Soumaïla est député aujourd'hui à l'Assemblée nationale. Il est PDCI, il a remporté la victoire.  Si nous étions inféodés au pouvoir et adversaires, il n'aurait jamais été élu.  Parce qu'on ne fait pas la passe à son adversaire. À Zého, le PDCI-RDA en coalition avec EDS était opposé au RHDP. Le PDCI-RDA a remporté la victoire aux législatives à Zého. Si nous étions inféodés ou adversaires, ça ne serait jamais fait ainsi. A Béoumi, chez mon excellent grand frère, l'honorable maître Blessy, le PDCI était opposé au ministre Sidi Tiémoko Touré du RHDP ; il a remporté la victoire. Si nous étions inféodés au pouvoir ou des adversaires, on n'aurait jamais fait la passe. Et, je peux citer plusieurs exemples comme ça. C'est parce que nous sommes des arbitres que toutes ces victoires ont été possibles. Au niveau des élections municipales : Cocody, Marcory, Plateau, Yamoussoukro…le PDCI a remporté toutes ces élections contre le RHDP qui est au pouvoir. Si nous avions été inféodés au pouvoir, ce sont des choses qui n’allaient jamais avoir lieu.

 Je tiens à insister sur ces choses-là.  Parce que ce sont des petits actes négatifs qui affectent la crédibilité de la CEI. Et, je ferai de sorte que ces documents vous soient remis après, pour que vous puissiez vous-même vous faire une idée.  Il n'y a pas que seulement l'élection municipale. Il y a les élections régionales et également la sénatoriale.

Le PDCI, le PPA-CI ou EDS en son temps, le FPI ont été opposés au parti au pouvoir, ils ont remporté des victoires. Voyez-vous, j'ai une anecdote : le jour des élections législatives, un candidat à Yopougon, je ne sais pas où il a eu mon numéro, m’appelle et me dit : “M. le Président, ils sont en train de nous voler notre victoire à Yopougon. Pour faire preuve de notre transparence et de notre objectivité, j'ai demandé à toutes les commissions locales, et à monsieur Dogou le superviseur de venir à la commission électorale. De 18h jusqu'à 4h du matin,  nous avons compilé et nous avons accordé la victoire à celui qui la méritait. C'est-à-dire, les partis de l'opposition. Apparemment, ils  ne s’en souviennent plus. Et, ils considèrent  que la Commission électorale indépendante est contre eux. Non, il ne faut pas tromper les gens. Nous ne sommes  pour personne et nous ne sommes  contre personne. Nous sommes  dans l'ancre de la loi. C'est ce qu'il faut aussi dire. Ensuite, on dit que  la commission électorale n'est pas impartiale parce que tout simplement elle refuse de faire la révision en 2025. Mes collègues commissaires sont passés sur les plateaux pour dire ce qui s'est réellement passé. Je vais revenir là-dessus pour clore le débat.

Vous savez, quand on a fini l’élection du président de la République en 2020 et les élections législatives en 2021, on a organisé des ateliers au cours desquels les partis politiques, les membres de la société civile nous ont demandé entre autres  recommandations de faire le toilettage de la liste électorale en extirpant  les personnes décédées. On leur a dit que les personnes décédées ne votent pas. Ils ont dit oui, mais il faut les sortir de la liste électorale. Ensuite, ils ont dit vous devriez mettre désormais à notre disposition la liste électorale définitive pour aller collecter le parrainage. Parce qu'en 2020, c'est la liste provisoire qui a été utilisée. On a dit  on est d'accord avec vous. Parce qu'on a tous connu des désagréments  à l'usage de la liste provisoire pour la collecte du parrainage.

Vous savez pourquoi ? Le parrainage, c'est en 2020 qu’il a été expérimenté pour la première fois dans le système électoral ivoirien. Et, le code électoral dit ceci : la déclaration de candidature doit être obligatoirement accompagnée de la liste des personnes ayant parrainé la candidature avec en regard le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance, la circonscription concernée, mais particulièrement le numéro  de la carte électeur ou à défaut de la carte d'identité  et de la signature de l'électeur. Conditions de validité du parrainage. Or, étant coincés par le temps, on a eu à utiliser la liste provisoire. Parce que nous n'avions jamais expérimenté le parrainage. Mais celui qui s'est écrit sur la liste provisoire, il n'a pas vocation à éditer la carte électeur, comment fait-il pour prouver sa qualité d'électeur ? Voilà pourquoi certains des candidats avaient perdu un certain nombre de parrainages à leur profit, parce que les personnes inscrites sur leur liste de parrainage n'ont pu justifier leur qualité d'électeur. Pour ne plus retomber dans cette situation  et en accord avec les partis politiques, ils nous ont dit  désormais « plus jamais vous ne devez mettre  à nos dispositions une liste provisoire pour aller collecter les parrainages”.  C'est la liste définitive.

 Et ensuite, il faut la mettre suffisamment tôt  de trois à six mois, à notre disposition, avant le délai même dédié au dépôt des dossiers de candidature. Nous avons dit si vous voulez que ça soit fait ici, la révision de la liste électorale  va commencer en juin 2024. Ils disent d'accord.

Venue, cette date, ils disent qu'il pleut.  Ils disent qu'on n'a pas suffisamment sensibilisé nos militants. Donnez-nous du temps. Nous partons en septembre. En septembre, ils disent  que c'est la rentrée. Les parents  seront plus préoccupés à l'inscription  de leurs enfants à l'école que de venir  s’inscrire sur la liste électorale. C'est comme ça qu'on a opté pour le 19 octobre. Mais quand vous reculez la date de la révision de la liste électorale, vous reculez également la date de la mise à disposition de la liste électorale définitive  à votre disposition. Et, comme nous sommes partis de juin jusqu' en octobre, la conséquence c'est qu’on est obligé de vous donner la liste électorale définitive en juin.

Mais entre-temps, il faut qu'on fasse le traitement. A notre grande surprise,  une partie des acteurs politiques nous demandent de faire la  révision de la liste électorale.  On ne peut pas faire une révision  dans une révision. On n'a pas terminé la révision qui est en cours.  Parce que quand vous devez faire une révision, vous vous inspirez de la révision précédente. Or, celle qui précède n'est pas terminée (...)  Ils nous disent qu’on peut utiliser la liste provisoire pour le parrainage chose qu’ils ont déjà décriée.

Mais les règles ne sont pas faites seulement pour les partis politiques. Nous aussi, on a eu des problèmes pour l'utilisation de la liste provisoire. Voilà autant d'éléments qui ont justifié  qu'on ne fasse pas droit à cette liste.

En fait, nous avons dit  que lorsque  on se rendrait,  conscient de  que nous n'allions pas faire la révision de la liste électorale en 2025, on a augmenté le nombre de centres d’enrôlements et on a autorisé  les mineurs de 17 ans à s’enrôler en 2024 pour qu'avant la publication en 2025, ils puissent s'inscrire. Voilà.  C'est tout le sens de notre mécanisme, de notre accord. Mais, on dit qu'il faut nécessairement faire cette révision. On dit d’accord l’élection présidentielle. Là encore problème. On dit que la révision est pour l’élection présidentielle. C'est faux. Que dit l'article 6 dont tout le monde s’inspire tant? L'article 6 dit ceci: La liste électorale est tenue à jour  annuellement pour tenir compte des mutations intervenues  dans le corps électoral. Ce qui motive une révision, ce n'est pas une élection. Ce sont les mutations qui sont intervenues dans le corps électoral.

C'est pour cette raison que la révision se fait en dehors des années électorales

Si la révision était liée à l'élection, on ne l'aurait jamais fait en 2023 (...) On parle de l’article 6 sauf que l’article 11 dit que la période de l’établissement de la liste électorale ainsi que ces modalités pratiques des décisions sont fixées par un décret pris en conseil des ministres sur proposition de la CEI. C'est la CEI qui détermine la période. Ce n'est pas vous les partis politiques. Pourquoi voulez-vous qu'on se plie à votre volonté, même si celle-ci contrarie la loi. La Commission électorale indépendante a un souci avec cette façon de procéder (...) ».

Propos recueillis par Lacina Ouattara