Variole du singe : L’OMS déclare l’état d’urgence sanitaire mondial, 16 cas diagnostiqués en Côte d’Ivoire
Après la COVID19, une autre épidémie menace le monde, notamment celle du virus mponx encore appelé la variole du singe. La situation est telle que l’OMS a déclaré l’état d’urgence sanitaire.
Les signaux sont au rouge vif ! Le virus mpox ou la variole du singe suscite actuellement l’inquiétude à travers le monde. La propagation rapide d’une souche plus dangereuse de ce virus a amené l’Organisation mondiale de la santé ( OMS) à déclencher le mercredi 14 août 2024, son plus haut niveau d’alerte sanitaire au niveau mondial. Un jour avant, c’était le Centre de contrôle et de prévention des maladies du continent ( Africa CDC) qui en faisait autant.
Invité de la plateforme Radio Santé CI, le jeudi 15 août 2024, Dr Amani Yao Raphaël, médecin épidémiologiste à l’Institut national de l’hygiène publique (INHP), chargé de la coordination de la surveillance d’un certain nombre de maladies à potentiel épidémique dont la mpox, a indiqué que pour la seule année 2024, ce sont 2745 cas qui ont été confirmés et 456 décès enregistrés. Aussi, l’OMS a été amenée à déclarer l’état d’urgence sanitaire au vu de la propagation de l’épidémie dans d’autres pays et ce, conformément au Règlement sanitaire internationale (RSI). En effet, s’il est connu que la maladie touche l’Afrique en général et la République Démocratique du Congo (RDC) en particulier, ce sont au moins 10 Etats africains, a annoncé Dr Amani Yao Raphaël, qui ont signalé des cas. Il a été constaté que non seulement le virus semble se propager plus vite mais il touche des régions d’Afrique de l’Est historiquement épargnées. « Au cours du mois dernier, environ 90 cas de clade 1b ont été signalés dans quatre pays voisins de la RDC qui n’avaient jamais signalé de mpox auparavant : Burundi, Kenya, Rwanda et Ouganda », a précisé le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, auprès des journalistes.
De plus le variant 1b s’étend aussi chez des populations qui semblaient jusqu’ici « immunisées ». Alors qu’il touchait particulièrement des hommes homosexuels et bisexuels il y a deux ans, le virus affecte désormais autant les hommes, les femmes que les enfants. Et il se transmet par ailleurs principalement par voie sexuelle, une première en Afrique.
Plus d’une dizaine de cas en Côte d’Ivoire
En Côte d’Ivoire les premiers cas confirmés ont été notifiés au mois de juillet. Dans un communiqué, le ministère de la Santé de l’Hygiène publique et de la Couverture Maladie Universelle annonçait 6 cas dans les districts sanitaires de Tabou (1 cas), Koumassi (1 cas) et Yopougon (4 cas). Depuis lors, la situation a évolué. A la date du 15 août 2024, 16 cas selon Dr Amani Yao Raphaël ont été diagnostiqués dans 9 districts sanitaires avec 1 décès enregistré. Ces cas ont été recensés aussi bien à Abidjan qu’à l’intérieur du pays. Traditionnellement, la maladie était liée aux zones rurales, mais cette fois-ci, des cas sont survenus aussi en milieu urbain. « Nous avons des élèves, des agriculteurs, des fonctionnaires », a-t-il cité. Indiquant que des mesures ont été prises pour la prise en charge des malades en milieu hospitalier et communautaire. Ainsi, les personnes qui ont été en contact avec les cas confirmés font également l’objet de suivi. « Pour les 16 cas confirmés, il y a à peu près 145 personnes sujets contacts recensés dont 31 agents de santé. 59 ont terminé le suivi chez qui on n’a pas détecté de cas », a confié le médecin épidémiologiste. Aussi, les capacités de surveillance ont été renforcées et la communication avec les populations renforcée.
Une zoonose qui s’installe chez les hommes
Le virus mpox est divisé en deux types génétiques. Il y a le clade 1 et le clade 2. Le clade 1 est cantonné en Afrique centrale et le clade 2 en Afrique de l’ouest. Le seul pays où on trouve les deux clades est le Cameroun. « Cependant, il faut savoir qu’il y a des mutations qui se passent chez chaque clade. Et ce sont ces mutations qui sont à l’origine d’une virulence plus importante ce qui donne des cas beaucoup au fil des années », a expliqué Dr Amani Yao.
La présente épidémie selon l’OMS est provoquée par la souche Clade 1 et par une variante encore plus dangereuse, le Clade 1b. Cette maladie est une zoonose, donc intertransmissible entre les hommes et les animaux. C’est une maladie virale dont le virus a été découvert pour la première fois en 1958 chez des singes en captivité au Danemark. Le premier cas humain a été identifié en RDC en 1970. Depuis lors, ce virus a fait son chemin. C’est donc un virus qui sait s’exporter, note l’épidémiologiste. Une épidémie a ainsi été déclarée aux Etats Unis en 2003 où des rongeurs venus du Ghana ont contaminé d’autres rongeurs, puis 40 personnes par la suite.
La maladie a deux grands modes de transmission de l’homme à l’animal et de l’homme à l’homme.
La transmission zoonotique, donc de l’animal à l’homme, se fait à partir des contacts de liquides biologiques, des lésions d’animaux infectés, de sang d’animaux ou encore lors de manipulation du gibier, de denrées mal cuites, de blessures, de griffures.
La transmission humaine se fait par contact étroit avec des lésions cutanées, des fluides corporels, des secrétions des voies respiratoires des sujets malades, à travers des matériaux souillés qu’on manipule. La transmission humaine indique le spécialiste se fait également de la mère à l’enfant, pendant la grossesse, lors de l’accouchement ou de l’allaitement. Mais aussi lors de contacts intenses, étroite et prolongé. Cette mode de transmission, a-t-il souligné, rappelle celle du COVID 19.
Outre ces modes de transmission, la transmission par voie sexuelle, a révélé Dr Amani Yao, devient aussi de plus en plus importante avec le clade 1b qui est donc une mutation du virus.
Femmes et enfants aussi touchés que les hommes
Le variant 1b s’étend aussi chez des populations qui semblaient jusqu’ici « immunisées ». Alors qu’il touchait particulièrement des hommes homosexuels et bisexuels il y a deux ans, le virus affecte désormais autant les hommes, les femmes que les enfants. L’âge, a indiqué l’épidémiologiste, est un facteur de complication de la maladie. « Chez les enfants atteints de malnutrition on peut avoir des formes extrêmement graves. Quand on a un système de défense affaibli, on peut avoir des formes graves », a-t-il expliqué. En Côte d’Ivoire, 75% des cas ont au moins 15 ans. Trois cas ont entre 5 et 14 ans et un cas de 3 ans. Mais de façon générale en Afrique, 60% cas, a-t-il déclaré, sont des enfants.
Une fois infecté, le temps d’incubation, a-t-il poursuivi, dure 6 à 13 jours voire 21 jours. Après cette phase, on aura la phase invasive. Avec des symptômes qu’on peut retrouver dans toutes les maladies infectieuses. A savoir, la fièvre, des douleurs musculaires et dorsales, des ganglions dans différentes parties du corps. Suit la phase éruptive. « C’est en ce moment que les boutons, les éruptions qui n’épargnent aucune partie du partie corps, même si elles apparaissent le plus souvent sur les extrémités, c’est-à-dire les mains, le pied, le visage y compris les muqueuses (dans la bouche), apparaissent. Et ces boutons vont apparaitre dans un certain ordre. Il y aura une petite élevure sur la peau qui va contenir de l’eau. Cette eau va s’infecter pour devenir du pue. Et ça peut s’ouvrir pour couler d’où la contamination de notre environnement. Ensuite à la dernière étape, il y a l’apparition de croute et nous allons vers la cicatrisation », a-t-il commenté. Toutefois, le patient, a-t-il prévenu, reste contagieux jusqu’à ce que les croutes tombent. Et le malade peut évoluer de façon positive vers la guérison. Cela prend deux à quatre semaines. Mais, il y a des risques de complications. Notamment des infections secondaires (pulmonaires, de tout le sang, de l’œil qui peuvent conduire jusqu’à la cécité). Il peut avoir aussi des cicatrices importantes qui peuvent gêner des personnes.
L’Afrique en manque de vaccin
L’épidémie de 2022, surtout circonscrite aux États-Unis et en Europe, a été endiguée grâce aux tests, aux vaccins et aux traitements. Autant d’éléments qui manquent actuellement à l’Afrique. À cet égard, Ayoade Alakija, présidente de l’Alliance africaine pour l’accès aux vaccins, déclarait dans les colonnes du quotidien français Le Monde : « L’insuffisance du nombre de tests en Afrique a compromis la riposte à l’épidémie en ce qui concerne les connaissances sur la manière dont le virus se déplace et sur les meilleurs endroits où développer des interventions ciblées, notamment des traitements et des vaccins. »
L’Union européenne a annoncé donner 215 000 doses de vaccin mpox à Africa CDC. Une goutte d’eau dans l’océan quand on sait que le centre réclame 10 millions de doses de vaccin d’ici 2025.
Le directeur général d’Africa CDC, Jean Kaseya, a lui-même reconnu que le don de l’UE ne serait pas suffisant, d’autant que ce vaccin nécessite deux doses. Il a évoqué un programme bien plus ambitieux avec l’Europe qui est en cours d’élaboration et devrait permettre de distribuer les dix millions de doses nécessaires.
En attendant l’OMS recommande une coopération et coordination de tous les pays pour aider à lutter contre cette épidémie. L’épidémie circule toujours à faible bruit sur les autres continents. Un premier cas du nouveau variant a d’ailleurs été découvert en Suède, une première.
Dao Maïmouna
Eviter de manipuler les animaux sauvages
Le mpox est transmis par un virus. Pour confirmer la maladie, On fait un prélèvement de peau qu’on achemine au laboratoire pour des analyses. Comme la plupart des maladies virales le traitement, a expliqué Dr Amani Yao, est d’abord symptomatique. On soulagera les symptômes du malade. En prévenant et gérant aussi des complications et les séquelles. Et assurer un bon état nutritionnel tout en assurant un soutien psychologique aux patients et familles. Il y a aussi, a-t-il indiqué, des traitements antiviraux dans certains formes graves.
En ce que concerne la prévention, le médecin recommande d’éviter les contacts avec les animaux susceptibles de porter ce virus, surtout les animaux malades ou trouvés morts. Si on entre en contact avec les animaux malades, trouvés morts, des vêtements souillés, il faut se laver les mains à l’eau et au savon. Le lavage des mains, a-t-il insisté, est vraiment très important. Et aussi bien cuire les denrées animales. Eviter de partager la lingerie. Quand on est malade, il faut s’isoler. Lors d’un décès, il faut éviter de manipuler le corps.
DM