Du 7 août 1960 au 7 août 2024 : Les trois grandes vies de la Côte d’Ivoire indépendante
D’Houphouët-Boigny à Alassane Ouattara, la Côte d’Ivoire a connu un parcours fait de hauts et de bas. Retour sur les grandes étapes de la vie de cette jeune Nation qui fête ce mercredi 7 août 2024, ses 64 ans d’indépendance.
Le 7 août 1960, le président Félix Houphouët-Boigny proclame, lors d’un discours solennel, au sein de l’Assemblée nationale, au Plateau, l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Un événement mémorable qui marque officiellement, ce jour-là, la fin de 67 années de colonisation marquées par les travaux forcés, farouche lutte anticoloniale dans l’Afrique occidentale française et le fameux référendum initié par le Général Charles de Gaulle.
Aujourd’hui, il y a donc 64 ans, que la Côte d’Ivoire a entamé, seule, sa marche vers le progrès. Mais, le parcours de la jeune Nation a été tout sauf un long fleuve tranquille. Il a été semé d’embûches. Entre espoir, doute et résurrection.
Cette aventure peu ordinaire a débuté avec un homme extraordinaire : Félix Houphouët-Boigny. Quand il devient, avec l’obtention de la souveraineté, le tout premier président de la République de Côte d’Ivoire, ce brillant médecin, qui s’est révélé être un syndicaliste coriace, nourrit déjà une grande vision pour son pays. Là où certains de ses pairs choisissent la révolution, sur fond de propagande anti-impérialiste, l’ancien leader du syndicat agricole africain opte pour le développement. Dans son esprit : les choses sont claires. Faire de la Côte d’Ivoire, une locomotive de l’Afrique de l’ouest.
Ainsi, il lance un vaste de construction, en ayant l’intelligence de s’appuyer sur l’expertise de l’ancienne puissance coloniale, la France. Et surtout sur l’atout majeur de la Côte d’Ivoire à cette époque : l’agriculture. Il initie une politique agricole efficace avec pour leviers des cultures de rente : le café, le cacao, le palmier à huile…
En 1960 et 1970, l’agriculture ivoirienne se développe à une vitesse grand V. Comme l’attestent ces chiffres : les récoltes du cacao s’accroissent fortement, passant du simple au triple, pour atteindre 312 000 tonnes ; celles du cacao grimpent de 185 500 à 275 000 tonnes. Quant aux exportations de bois, elles sont également en nette hausse, entre 1950 et 1965, passant de 90 000 à 1 250 000 tonnes.
L’âge d’or avec Houphouët-Boigny
Avec les ressources générées par ces matières premières, il dote le pays d’infrastructures indispensables au développement : routes, autoroutes, ponts, échangeurs, barrages hydro-électriques, écoles, centres de santé, électrification, accès à l’eau potable etc. Il accorde une importance particulière à l’éducation. Par exemple, le 9 juin 1964, il signe un décret qui transforme le Centre d'enseignement supérieur d'Abidjan, créé en 1958, à une université, celle de Cocody, qui porte désormais le nom d’Houphouët-Boigny.
Sur le plan économique, il opte pour le libéralisme avec un code des investissements qui attirent de nombreux investisseurs étrangers. Ceux-ci ont, en effet, la possibilité de rapatrier jusqu’à 90 % de leurs bénéfices dans leur pays d’origine ; les 10 % restants étant obligatoirement réinvestis en Côte d’Ivoire.
Cette stratégie bien pensée porte ses fruits : un taux de croissance de 11 à 12 % durant la période de 1960 à 1965 ; une augmentation exponentielle du PIB (multiplié par 12), entre 1960 et 1978, de 145 à 1 750 milliards de francs CFA ; une balance commerciale constamment excédentaire… Un essor économique lumineux soutenu par le développement de l’agroalimentaire à travers l’installation de minoteries, d’huileries et de conserveries, et la mise en place de filatures et de scieries pour booster la transformation. Là aussi, les résultats sont édifiants : entre 1960 et 1973, la production industrielle enregistre un taux de croissance annuelle moyen de 20 %, faisant passer sa part dans le PIB de 15 à 25 %. La grande et petite industrie connaît une croissance fulgurante durant cette période. Son chiffre d’affaires passe 13,5 à 164 milliards de francs CFA, et de 1973 à 1983, il est multiplié par 8,5, atteignant 1 170 milliards de francs CFA.
Au niveau de l’éducation, la Côte d’Ivoire fait également un bond prodigieux. En plus de l’Université, de nombreux établissements scolaires sont construits un peu partout dans le pays, dont des écoles d’excellence : l’INSET, l’ENSA et l’ENSTP (qui formeront l’Institut national polytechnique Houphouët-Boigny), le lycée scientifique à Yamoussoukro ; le lycée classique d’Abidjan, le lycée Sainte Marie de Cocody etc. Toute chose qui contribue à relever le taux de scolarisation dans le pays. A cela s’ajoute la construction du quartier des affaires, le Plateau ; et la modernisation de nombreuses grandes villes du pays : Yamoussoukro, Bouaké, Korhogo, Daloa, San Pedro etc. C’est le premier miracle économique ivoirien qui fait de la Côte d’Ivoire au milieu des années 70 un îlot de prospérité dans la sous-région. Le pays se dote également d’édifices pharaoniques, à l’image de la Basilique Notre-Dame de Yamoussoukro, la plus grande du monde, inaugurée en 1990, par le Pape Jean-Paul II, la grande mosquée de cette ville ; la cathédrale Saint Paul du Plateau, la plus imposante d’Abidjan etc.
Mais, Houphouët-Boigny n’a pas fait que construire des ouvrages, il a aussi et surtout bâti la paix, la stabilité et la cohésion sociale. « La paix, ce n’est pas un mot, c’est un comportement », répétait-il, à l’envi. Le sage de Yamoussoukro a fait, durant ses trente-trois années de règne, de la Côte d’Ivoire, un havre de paix. Un modèle achevé du vivre ensemble les Ivoiriens vivaient en bonne intelligence, sans distinction d’ethnie ni de religion. Aussi bien entre eux qu’avec leurs frères et sœurs venus de la sous-région ouest-africaine. « À l'Indépendance, nous n'avons pas hérité des nations. On a parlé de balkanisation de l'Afrique mais il faut reconnaître que ce n'est pas le colonisateur qui l'a balkanisée. Bien au contraire, il a essayé de nous rassembler, car l'indépendance nous a surpris en plein tribalisme », confiait celui que les Ivoiriens appelaient affectueusement « le vieux » dans une interview accordée à un journaliste occidental. Justement, il s’est évertué à faire en sorte que les Ivoiriens pensent d'abord à la nation avant la tribu. Et il l’a réussi remarquablement, en créant une symbiose entre les populations vivant en Côte d’Ivoire. Toutefois, avec la chute des cours des matières premières sur le marché international, le pays est en proie vers la fin des années 80 à une récession économique sans précédent. Les ressources de l’Etat s’amenuisent. La Côte d'Ivoire annonce à ses créanciers internationaux qu'elle ne peut plus payer ses dettes. Entre-temps, les conditions de vie des Ivoiriens deviennent pénibles ; la grogne sociale monte, notamment en milieu estudiantin et scolaire. Le 2 mars 1990, à l’initiative de la Fesci (Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire), des élèves et étudiants descendent dans la rue. « Houphouët voleur, Houphouët corrompu, Houphouët démission ! », scandent-ils. A Abidjan, la marche dite pacifique donne lieu à une guérilla urbaine entre manifestants et forces de l’ordre. Avec à la clé des scènes de violence et de pillage. Dans la foulée, le gouvernement annonce la fermeture des établissements scolaires. Un mois plus tard, soit le 7 avril 1990, les écoles rouvrent, et nouvelle flambée de violences. Elles sont à nouveau fermées. L’année blanche est décrétée… Face à l’asphyxie de l’économie ivoirienne, Houphouët-Boigny envisage, pour la première fois, en trente années de gouvernance, une baisse des salaires des fonctionnaires et agents de l’Etat. Cette proposition du comité interministériel mis en place pour trouver une solution à la crise que traverse le pays ne rencontre pas l’assentiment des Ivoiriens. Pour ne pas en rajouter à la colère de ses compatriotes, Houphouët-Boigny recule et fait appel au gouverneur de la Bceao, Alassane Ouattara qu’il nomme Premier ministre. Ce brillant économiste, qui a fait carrière au Fonds monétaire international (FMI), lance, avec son gouvernement, un plan de redressement de l’économie, avec entre autres une réduction drastique du train de vie de l’Etat, une réorganisation de l’administration avec de nouveaux horaires de travail, une restructuration de l’économie ivoirienne, une vraie culture du résultat portée par la lutte contre l’absentéisme. Les résultats de cette gouvernance efficiente ne tardent pas. Le pays relève la tête et envisage des perspectives plus sereines et radieuses lorsque Houphouët-Boigny, affaibli par un cancer, tire sa révérence le 7 décembre 1993. La Côte d’Ivoire tourne ainsi une belle page de son histoire. Pour en ouvrir une autre. Mais, elle est loin de douter de ce qui l’attend.
La descente aux enfers avec Bédié, Guéi et Gbagbo
Quelques heures après l’annonce du décès du Président Houphouët-Boigny, son dauphin constitutionnel, Henri Konan Bédié, président de l’Assemblée nationale, se précipite sur le plateau du JT de 20h de la première chaîne de la télévision nationale, pour annoncer à la Nation sa prise du pouvoir. Il devient le 2ème président de la République de la Côte d’Ivoire. Malheureusement, il ne perpétue pas l’héritage de paix et de cohésion sociale légué par son prédécesseur. Qui, pourtant, l’avait couvé et coaché pendant de longues années.
Sur le plan politique, il se démarque aussitôt de son mentor. Si Houphouët-Boigny prônait l’ouverture, Henri Konan Bédié choisit, lui, le renferment sous fond de nationalisme.
Élu président du PDCI-RDA, le 30 avril 1994, il fait voler en éclat l’unité de ce parti, en ostracisant les militants supposés être proche de l’ancien Premier ministre Alassane Ouattara, avec qui il est en rivalité.
Excédés par les exactions du camp Bédié, ces hommes et ces femmes claquent la porte du PDCI et portent, en septembre 1994, sous la houlette de Djéni Kobina, sur les fonts baptismaux le Rassemblement des Républicains (RDR). L’héritage d’Houphouët part du coup, en lambeaux, car de son vivant, il s’est toujours battu pour préserver l’unité de sa formation politique.
Mais, Bédié n’en a cure. Ce qui le préoccupe ; c’est consolider son régime. Quitte à diviser les Ivoiriens pour mieux régner. Le 23 novembre 1994, il fait adopter un nouveau code électoral qui restreint la candidature à l’élection présidentielle aux citoyens nés de parents ivoiriens, eux-mêmes nés de parents ivoiriens.
C’est dans cette optique qu’il crée l’« ivoirité ». Un concept faussement culturel des intellectuels pro-Bédié, qui en réalité, sous-tend une politique exclusionniste. Et les faits le démontrent rapidement. Les Ivoiriens sont classés en deux groupes. D’un côté, il y a ceux qui sont dits de souche multiséculaire et considérés comme de « vrais » Ivoiriens. Et de l’autre, ceux présentés comme des Ivoiriens de circonstance ou d’origine douteuse. Concrètement, les ressortissants du Nord sont victimes à la fois d’un délit de faciès et d’un déni de patronyme. Ils sont traqués, via des rafles successives et des contrôles d’identité intempestifs. Et à chaque fois, ils doivent prouver leur citoyenneté ivoirienne bien qu’ils aient les documents administratifs y afférents. Parfois, les cartes d’identité sont arrachées par les forces de l’ordre. Et ils sont assimilés à des étrangers dans leur propre pays. Du coup, la xénophobie et le tribalisme sont exacerbés, sur fond de conflit foncier par exemple à l’ouest du pays. Dans l’administration, une épuration des cadres nordistes, suspectés de sympathiser avec le RDR et Alassane Ouattara, est orchestrée sans grand bruit. La fracture sociale est, de ce fait, consacrée. Et l’opposition menée, par le RDR et le FPI, s’insurge contre cette dictature rampante. Ses manifestations sont réprimées dans la violence. Conséquence, le climat social se tend et l’atmosphère devient totalement délétère.
Entre-temps, au niveau de la gouvernance économique, Bédié, qui a entre-temps, a été réélu en octobre 1995 aux commandes du pays à l’issue d’un scrutin sans réel challenger, ne fait pas non plus mieux. L’administration est gangrenée par la corruption, les milliards générés par les programmes d’ajustement structurel lancés quelques années plus tôt par Alassane Ouattara sont dilapidés. Le pouvoir Bédié est même éclaboussé par le détournement des 18 milliards de l’Union européenne versés pour appuyer les dépenses de santé. De plus, les 12 chantiers de l’Eléphants d’Afrique qu’il a promis resteront un vœu pieux. Excepté quelques infrastructures routières dont la côtière qui relie Dabou à San Pedro, l’axe Korhogo Boundiali, le tronçon Katiola-Dabakala, la route Kotobi-Bonahouin… et hydroélectriques ( les centres thermiques Azito 1 et 2, Ciprel 1 et 2) ou encore la création des chaînes Agripac, on ne retient pas grand-chose de sa présidence si ce n’est son acharnement quasi-obsessionnel sur l’opposant Alassane Ouattara, au point d’emprisonner presque toute la direction du RDR et de lancer un mandat d’arrêt international contre l’unique Premier ministre d’Houphouët-Boigny. Résultat de cette course effrénée tout droit dans le mur : il est renversé, le 24 décembre 1999, par une mutinerie de soldats qui se mue en un coup d’Etat sans la moindre effusion de sang. Le tout premier de la jeune histoire de la Côte d’Ivoire, accueilli par une liesse populaire indescriptible.
La junte, qui balaie le régime Bédié, est conduite par un officier général de l’armée ivoirien, Robert Guéi que Bédié avait fait tomber en disgrâce quelques années plus tôt, en l’accusant de vouloir faire un putsch. Ironie du sort, et incroyable revanche du destin.
Porteuse d’une espérance nouvelle, la transition dévie de son objectif : organiser des élections inclusives, ouvertes et transparentes. Aveuglé par la boulimie du pouvoir, le général à la retraite se reconvertit en homme politique avec la complicité sournoise du FPI de Laurent Gbagbo qui lui fait miroiter un destin présidentiel. Au lieu de balayer la maison, il décide de s’y installer durablement, en se donnant, à travers une élection présidentielle controversée, après un référendum tout aussi critiqué, une légitimité politique. Sur la base d’un pacte secret conclu avec Laurent Gbagbo, le général Guéi écarte toutes les candidatures susceptibles de lui faire ombrage, notamment celles d’Alassane Ouattara et d’Henri Konan Bédié. Les deux « alliés » partent aux élections en octobre 2000. La suite, on la connaît : Guéi est battu à plate couture par Laurent Gbagbo qui obtient 59,36 % des voix contre 32,72 pour le chef de la junte.
Il tente de confisquer le pouvoir en renversant le résultat des urnes. C’était mal connaître son le leader du FPI qui appelle au soulèvement populaire. Guéi tente de riposter, mais au bout de soixante-douze heures de bataille, il plie l’échine et se réfugie à Toukouzou- Hozalem, chez Papa Nouveau, le cœur meurtri avec le profond sentiment d’avoir été trahi.
Qu’importe, Laurent Gbagbo prête serment le 26 octobre 2000 comme président de la République, au Palais présidentiel du Plateau. Pendant ce temps, les forces de l’ordre à sa solde répriment sauvagement une manifestation des militants du RDR qui appelaient à la reprise du scrutin, vu que deux poids lourds de la vie politique nationale avaient été arbitrairement écartés. Le lendemain, un chantier de 57 corps nus, mitraillés, est découvert dans la forêt du Banco, à la lisière de Yopougon. Laurent Gbagbo accède ainsi à la magistrature du pays dans des conditions qu’il qualifie lui-même de « calamiteuses ». Son règne sera tout aussi désastreux, malgré un forum sur la réconciliation nationale organisé en 2001. Les bonnes résolutions de cette rencontre de vérité sont rangées aux oubliettes, et la refondation, que promet Laurent Gbagbo, se révèle être une politique foncière « ivoiritaire ». Exit les bonnes intentions, bonjour l’exclusion, le tribalisme, la xénophobie. Pire, le régime Gbagbo travaillait sur un projet visant à entériner administrativement la division des Ivoiriens, avec deux couleurs de carte nationale d’identité, l’une pour les vrais Ivoiriens et l’autres les Ivoiriens douteux. Une forme d’apartheid qui ne dit pas son nom. Puis, survient, dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002, une tentative de coup d’Etat, qui se transforme en une rébellion consacrant la scission du pays en deux blocs, l’un au nord aux mains des rebelles rebaptisés « Forces nouvelles » et l’autre sous le contrôle des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (FANCI), appelées les loyalistes.
De 2002 à 2010, entre accords et pourparlers interminables, le pays alterne tensions et relative accalmie. Au même moment, le pouvoir Gbagbo se livre à une prévarication des derniers publics. Le népotisme et la gabegie sont érigés en mode de gouvernance. Les scandales s’enchaînent : déversement des déchets toxiques (en août 2006), détournement ahurissant dans la filière café-cacao avec l’achat d’une usine désaffectée à Fulton aux Etats, les milliards du pétrole engloutis…Que dire des 100 milliards de FCFA versés par Trafigura engloutis dans la nature ?
Prenant pour prétexte la rébellion, les refondateurs ont également instauré la terreur totale dans le pays : escadrons de la mort, enlèvements et exécutions sommaires d’individus (Yêrêfê Camarah dit H, Emile Téhé, Dr Benoît Dakoury-Tabley, Colonel-major Adama Dosso, les quatre disparus du Novotel), traque des opposants et répressions sauvages de leurs manifestations à l’image de celles des 24 et 25 mars 2004 ayant fait une centaine de morts, supplice du feu ( le fameux article « 125 », pétrole 100 FCFA et boîte d’allumettes de 25 FCFA) imposé à de supposés rebelles par les « Jeunes patriotes », saccage et incendie des sièges des journaux proches de l’opposition, exaltation du sentiment anti-français voire occidental, dérives verbales… Et pour couronner le tout, une crise postélectorale - née du refus de Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite dans les urnes - qui a fait officiellement, entre décembre 2010 et avril 2011. Cette parenthèse douloureuse se referme le 11 avril avec l’arrestation de Laurent Gbagbo, dans son bunker, à la résidence présidentielle de Cocody. C’est la fin de près de 20 années de tourments qui ont considérablement détruit l’harmonie sociale.
La renaissance avec Alassane Ouattara
Quand il prête le serment devant une foule d’Ivoiriens et un nombre impressionnant de chefs d’Etat et de gouvernement d’Afrique et de France, Alassane Ouattara, qui a remporté haut les mains le second tour de l’élection présidentielle, avec 54,1% des suffrages exprimés contre 46,9% pour le président sortant Laurent Gbagbo, a déjà conscience de l’immensité de la tâche qui l’attend. Il hérite d’un pays complètement à terre, avec une économie en jachère, une administration totalement déglinguée, une sécurité à la rue, une population divisée. Bref, tout, absolument, tout est à reconstruire.
Aussitôt, il met en place le Programme présidentiel d’urgence (PPU) pour répondre aux besoins urgents : le rétablissement des services sanitaires, éducatifs et de protection sociale, des réseaux d’eau et d’assainissement, des services de l’administration publique. Parallèlement, le chef de l’Etat actionne des mécanismes de dialogue et de promotion de la cohésion sociale et la réconciliation. Il installe, en 2011, la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation ( CDVR), dirigée par l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny et chargée de l’écoute des victimes. L’année suivante, il lance le Programme national de cohésion sociale (PNCS), piloté par le Pr Mariatou Koné, dont la mission principale est de contribuer à l’avènement d’une Côte d’Ivoire qui réapprend à vivre avec ses différences. En 2015, la CDVR, qui a auditionné, des dizaines de milliers de personnes, fait place à la Commission nationale pour la réconciliation et l'indemnisation des victimes des crises en Côte d'Ivoire (Conariv). Au bout de deux ans de mandat, elle recense 316 954 victimes des crises survenues dans le pays entre 1990 et 2011, selon Mme Yabah Berthe Karbo, directrice de cabinet du président de la Commission, lors de la remise de son rapport. Elle œuvre ardemment à la pacification des esprits dans le pays.
Ces instruments de réconciliation sont aussi aidés par la remise des barons de l’ancien régime, entre autres Pascal Affi N’guessan, Michel Gbagbo, fils de l’ancien président, Aboudrahamane Sangaré, Narcisse Téa Kuyo, Moïse Lida Kouassi, Alphonse Douaty pour ne citer qu’eux ; le retour de certains exilés. A cela s’ajoute des gestes forts d’apaisement du climat sociopolitique dont les plus marquants sont sans aucun doute l’ordonnance d’amnistie du 6 août 2018 qui a permis à 800 ex-prisonniers poursuivis ou condamnés pour des infractions en lien avec la crise postélectorale de 2010-2011 de recouvrer la liberté dont l’ex-Première Dame, Simone Gbagbo ; et le retour en Côte d’Ivoire le 17 juin 2021, de Laurent Gbagbo qui bénéficie désormais d’une grâce présidentielle. Avant lui, de nombreux exilés – y compris ses collaborateurs, avaient regagné le pays.
En marge de ces efforts pour la réconciliation, Alassane Ouattara s’attèle, aussi, à reconstruire le pays. Et depuis 2011, routes, autoroutes, ponts, échangeurs poussent comme des champignons. Les plus édifiants sont : le pont HKB, le pont Alassane Ouattara, le 4ème pont, le prolongement de l’autoroute du nord de Yamoussoukro jusqu’à Bouaké.
Au niveau de la santé, les plateaux techniques des hôpitaux ont été relevés, des CHU réhabilités et équipés, en plus de la gratuité ciblée. De nombreux centres de santé sont érigés. Idem pour l’éducation où écoles primaires, collèges et lycées pullulent à travers le pays, tout comme le nombre d’universités qui est passé de trois avant 2011 à 9 aujourd’hui.
Quant à l’accès à l’électricité, le taux de couverture dépasse en ce moment les 92% et vise les 100% à l’horizon 2025. Dans ce domaine, Alassane Ouattara a doté la Côte d’Ivoire de l’un des plus grands barrages hydro-électriques de l’Afrique de l’ouest qui se trouve à Soubré, avec une capacité de production de 275 mégawatts. Celui de Gripo-Popoli est aussi achevé. S’agissant du social, les faits d’armes du chef de l’Etat sont innombrables : déblocage des salaires des fonctionnaires et agents de l’Etat, paiement du stock des arriérés ( relatifs aux glissements catégoriels et avancements indiciaires), relèvement du Smig par deux fois ( de 36 607 à 60 000 FCFA puis 75 000 FCFA), augmentation de 20 000 FCFA de l’indemnité contributive de logement pour l’ensemble des fonctionnaires et agents de l’Etat, hausse de l’allocation familiale mensuelle par enfant de 2500 à 7500 FCFA, instauration des filets sociaux productifs et de la couverture maladie universelle (une première en Côte d’Ivoire), prime exceptionnelle de fin d’année dite « prime ADO »… Et l’économie ivoirienne dans tout ça ? C’est simple, elle a enregistré, grâce aux réformes du gouvernement, une croissance soutenue avec un taux moyen de 8% durant la dernière décennie. Elle est même l’une des plus performantes du continent. Avec un produit intérieur brut (PIB) nominal de 79,43 milliards de dollars fin 2023, la Côte d’Ivoire est, selon le FMI, la 2ème puissance économique de l’Afrique de l’ouest derrière le Nigéria. Les investisseurs y affluent et le dynamisme de l’économie a contribué à la création des millions d’emplois. Par ailleurs, la sécurité est revenue avec un indice qui est passé de 6,8 en 2012 à 1,2 en janvier 2024. Ce qui du pays d’Alassane Ouattara, l’un des plus sûrs sur le continent voire dans le monde. Sur le plan international, le pays a retrouvé sa place des concerts des nations, tout comme il a renforcé sa culture démocratique avec des élections locales inclusives et ouvertes en mars 2021 (législatives) et en septembre 2023. Dans le domaine sportif, la Côte d’Ivoire a glané, sous le magistère d’Alassane Ouattara, de nombreux trophées, dont une première médaille d’or olympique aux JO de Rio en 2016, deux coupes d’Afrique des nations de football (CAN 2015 et CAN 2023). L’histoire retient qu’elle a offert à l’Afrique, jusqu’à présent, la plus belle et la plus bénéfique des CAN. On le voit, en un peu plus de dix ans, Alassane Ouattara a fait de la Côte d’Ivoire, l’une des nations inspirantes, par son niveau de développement, le respect et la considération. Une vraie prouesse au regard de la situation dans laquelle elle était, il y a treize petites années.
Y. Sangaré